Un Frère m’a un jour raconté une histoire. Celle d’un enfant rêveur, différent, souvent incompris. À l’école, on le disait « en retard », « incapable de suivre ». Un matin, l’instituteur remit à sa mère une lettre à lire seule. À la maison, elle l’ouvrit, ses yeux s’embuèrent… mais elle sourit. Un sourire doux, lumineux, qui changea tout. Puis elle dit : « Ton maître pense que tu es trop brillant, trop particulier. L’école n’a pas les moyens de t’aider comme tu le mérites. Alors… je serai ton enseignante. »
Ce jour-là, la maison devint une école. La table devint un bureau, le balcon une bibliothèque. Sa mère fut son professeur, son guide, sa première initiatrice. Elle ne parla jamais de limites, seulement de possibilités. « Tu vois le monde autrement. C’est une force. »

Les années passèrent et l’enfant devint inventeur, scientifique, rêveur accompli. Bien plus tard, devenu adulte, il retrouva cette lettre. Il l’ouvrit, lut, et son cœur se serra : « Votre fils souffre de troubles sévères. Il n’est pas adapté au milieu scolaire. »
Il comprit alors : ce n’était pas la vérité qui l’avait sauvé, mais la parole élevée, celle qui guérit au lieu de condamner, qui ouvre au lieu de fermer.
Dans nos ateliers, nous apprenons cela : la parole est notre premier outil. Parler n’est pas remplir un silence, c’est créer. Nos mots peuvent relever ou abattre, apaiser ou blesser, éclairer ou obscurcir. Et une fois la porte du Temple franchie, nous avons le devoir d’emporter cette maîtrise dans le monde profane.
Dans un monde saturé de bruit, où les certitudes s’effritent et où la colère remplace la réflexion, le franc-maçon n’est pas celui qui parle le plus fort, mais celui qui parle le plus juste. Quand certains n’osent plus s’exprimer, quand d’autres baissent la voix, notre parole doit se lever : calme, droite, fraternelle. Le 32ᵉ degré le rappelle : « Le soldat de la liberté revendique la liberté de parole pour le peuple, et conquiert pour lui-même la liberté d’opinion. »
La grenade nous enseigne que nul n’est seul. Nous avançons ensemble, armés non pas de violence, mais de mots vrais. Un simple mot peut changer une vie, comme ceux d’une mère dans une simple cuisine. Le franc-maçon le sait : par la parole, nous semons la liberté, nous transmettons la lumière, nous réparons ce que le monde brise.
- Inspiré du texte de Rui Mouzinho – « A arma do Maçom«




