Rêveur éveillé, j’ai surpris un étrange conciliabule : celui des Éléments, devisant entre eux comme s’ils s’adressaient aux humains. De cette rencontre onirique, j’ai fait une fable, vêtue de poésie et nourrie de sagesse.
La voix de l’Eau
L’Eau prit la parole la première. Elle rappelait que ses clapotis comme ses déferlements trahissaient ses humeurs changeantes. Tour à tour nourricière et destructrice, elle féconde la terre quand on canalise ses débordements, mais elle ensevelit sous la boue ou se retire dans la sécheresse quand l’homme l’oublie. L’Eau se souvenait de l’énergie des moulins d’autrefois, symbole de sa puissance utile et bienveillante.
Le dialogue du Feu et de l’Air
Puis le Feu répondit :
« Je gèle sans toi, Eau, mais ton excès me fait bouillir. Je brûle ou je réchauffe, je détruis ou j’anime. »
L’Air intervint à son tour, invisible mais indispensable :
« Je meuble le vide, je porte les sons, je prends des couleurs pour signaler ma présence. Par ta chaleur, Feu, je suis mis en mouvement. Mais souviens-toi : je puis aussi t’éteindre ou t’attiser. »
L’Air se fit plus pressant encore :
« Hommes, protégez la flamme fragile, veillez sur vos forêts quand vole l’escarbille. Sur mer, hissez la voile ou ferlez-la quand je souffle en brise ou en tempête. »

La Terre et le cycle des saisons
Le Feu s’adressa alors à la Terre :
« Principe moteur, cœur des forces cosmiques, je ne vis qu’avec toi et les autres. Je réchauffe et j’éclaire, je sommeille en hiver, je t’anime par mes contrastes. De mon astre lointain, je viens chaque jour après un long chemin. »
La mise en garde des Éléments
Mais l’Eau rappela sa vulnérabilité : trop d’impuretés la corrompent. L’Air fit écho : trop de gaz étrangers l’empoisonnent. Le Feu, de son côté, refusa les matières qu’il ne peut consumer.
Alors, dans une même voix, les Éléments s’adressèrent à l’Homme :
« Gardez-vous des excès. Nos forces ne tolèrent pas d’apports étrangers au-delà d’un certain seuil. Banquise ou enfer naissent de nos déséquilibres. La mesure est notre loi, l’harmonie notre équilibre. »
Leçon de sagesse
Les Éléments rappelaient que l’impuissance et la destruction naissent du désordre, quand les harmonies naturelles sont brisées par trop de dissonances. Vouloir tout mélanger, prêcher l’utopie des contraires amalgamés, c’est méconnaître la spécificité de chacun.
Le sage, lui, sait que la diversité n’a de valeur que respectée dans ses limites. L’équilibre, toujours, repose sur le dosage.
« C’est au dosage qu’on reconnaît le sage. »
— Maurice Falcoz
Planche poétique de Maurice Falcoz, Frère de la loge Fidélité et Prudence




