Bonne nouvelle depuis Washington : le Temple Maçonnique Prince Hall situé sur U Street, au cœur de l’histoire afro-américaine de la capitale américaine, vient de conserver son statut d’exonération fiscale.
À l’heure où de nombreuses loges voient leurs temples centenaires vendus ou menacés, cette décision résonne comme une victoire patrimoniale et fraternelle.
Un lieu emblématique de la vie noire américaine

Construit entre 1922 et 1930, le temple occupe l’angle de la 10ᵉ Rue et de U Street. Bien plus qu’un bâtiment, il fut longtemps un centre culturel, social et économique de la communauté afro-américaine.
On y trouvait jadis un restaurant, un bowling, une salle de bal, des commerces, mais aussi des espaces de réunions fraternelles. U Street était alors surnommée le « Broadway noir », tant la vie y était vibrante.
Aujourd’hui encore, le temple demeure un repère vivant, témoin et acteur de cette histoire.
Une procédure administrative délicate
Récemment, les francs-maçons Prince Hall ont dû renouveler leur demande d’exonération fiscale, après avoir modifié le nom de leur organisation caritative.
Ce changement, en apparence mineur, aurait pu entraîner la perte du statut fiscal du bâtiment — avec des conséquences financières lourdes dans un quartier soumis à la gentrification et à la montée des prix fonciers.
Avec l’aide de la conseillère municipale Brianne Nadeau, la demande a été réexaminée puis validée par le Conseil du District de Columbia.
Le temple demeure donc propriété pleine et active de la fondation Prince Hall, sans charge fiscale immobilière supplémentaire.
Un rappel : Prince Hall, une histoire de résilience
La franc-maçonnerie Prince Hall naît au XVIIIᵉ siècle, lorsque Prince Hall, homme noir libre, reçoit les grades maçonniques à Boston, avant d’obtenir une charte de la Première Grande Loge d’Angleterre en 1787.
Faute d’avoir été reconnu par les loges blanches de l’époque, il fonde un réseau maçonnique autonome, dignement structuré, qui se déploiera dans tout le nord-est des États-Unis.
À Washington DC, la première loge Prince Hall naît en 1825, puis la Grande Loge Union en 1848.
En 1948, elle prend le nom qu’elle porte toujours :
Très Vénérable Grande Loge Prince Hall F&AM, affiliée à Prince Hall, District of Columbia.
Un modèle de préservation du patrimoine maçonnique
Cet épisode rappelle une réalité souvent méconnue :
- la préservation d’un temple
- n’est pas seulement une question de mémoire
- mais aussi de structure juridique et financière.
Aux États-Unis, les loges sont généralement des organisations 501(c)10 (exonérées d’impôt, mais sans déduction fiscale pour les donateurs).
Beaucoup créent à côté une fondation 501(c)3, dédiée au patrimoine, permettant aux dons d’être défiscalisés — à condition que le bâtiment conserve une dimension d’ouverture au public.
Ce modèle peut inspirer, en France, la création de fonds de dotation ou d’associations de sauvegarde, lorsque les temples ont une valeur historique, culturelle ou communautaire.
Ce qu’il faut retenir
- Le Temple Prince Hall est sauvegardé, dans sa fonction et son usage.
- Son rôle patrimonial et social est réaffirmé.
- Cette décision renforce l’importance de penser la préservation du bâti maçonnique avec lucidité et anticipation.
Référence
Article original : Christopher Hodapp (8 novembre 2025), complété d’informations issues de Black Enterprise.




