Tu m’as demandé un jour : « Pourquoi moi ? Qu’est-ce qui t’a fait penser que j’avais quelque chose à faire avec la franc-maçonnerie ? »
La question est légitime. Elle mérite une réponse franche, sans emphase et sans mystique inutile.
Je n’ai pas pensé à toi parce que tu correspondais à un “profil”.
Je n’ai pas pensé à toi parce que tu ressembles à un personnage de rituel.
J’ai pensé à toi parce qu’il y a chez toi quelque chose de rare : une manière d’être qui laisse entendre qu’un travail intérieur ne te ferait pas peur.
Tu poses des questions qui dérangent, mais utiles
Ce qui m’a frappé en premier, ce n’est pas ton érudition. C’est ta manière d’interroger les choses : calmement, mais en allant droit au fond.
Tu ne te contentes pas d’accepter ce qu’on te dit. Tu veux comprendre ce qui tient, ce qui sonne juste, ce qui résiste à l’analyse.
C’est exactement le type de regard qu’on attend avant toute initiation.
Tu ne confonds pas profondeur et gravité
Tu ne fais pas semblant de t’intéresser à l’essentiel : tu t’y intéresses vraiment.
Pas pour être différent, ni pour paraître sérieux, mais parce que tu refuses les discours creux.
La franc-maçonnerie française ne s’adresse pas à ceux qui veulent briller, mais à ceux qui veulent construire.
Tu fais partie de ceux qui préfèrent le solide au décoratif.
Tu es lucide sur tes forces — et sur tes angles morts
Ce n’est pas la perfection qui prépare un candidat, c’est la lucidité. Tu sais ce que tu vaux, et tu sais aussi ce qui te manque. Tu n’as jamais prétendu être irréprochable, et c’est tant mieux.
On ne travaille que sur une pierre qu’on accepte d’examiner. La tienne, tu ne la caches pas sous une couche de vernis.
Tu as un vrai sens de la liberté
Et pas la caricature qu’on sert dans les soirées : je parle de la liberté intérieure, celle qui permet de penser seul, d’écouter vraiment, de prendre position sans hurler, et de reconnaître quand on s’est trompé.
Dans une loge , c’est une qualité précieuse : elle évite les gourous, les dogmes, les dérives. Tu as déjà cette maturité.
Tu sais ce qu’est la fraternité — sans le dire toutes les trois phrases
La fraternité n’est pas un slogan. C’est une attitude : savoir écouter, soutenir quand il faut, et ne pas tout ramener à soi.
Tu n’en parles pas, tu la pratiques. C’est beaucoup plus convaincant.
Tu n’attendais pas la maçonnerie pour exister
Et c’est essentiel.
Ceux qui entrent en loge pour combler un vide font fausse route. Toi, tu n’avais pas besoin d’un cadre pour tenir debout. Mais tu avais en toi ce “plus” qui peut renforcer un atelier.
La maçonnerie ne t’aurait pas rempli — elle t’aurait prolongé.
Tu cherchais quelque chose, même si tu ne savais pas encore quoi
Ce n’était ni un malaise, ni une fuite. C’était une question silencieuse, une sorte de tension intérieure :
le besoin de mettre de la cohérence, de l’axe, du vertical, dans ce que tu vis et dans ce que tu choisis.
Cette recherche-là, la maçonnerie ne la résout pas. Elle t’offre un espace pour la mener sérieusement.
Alors, pourquoi toi ?
Parce que, dans ton attitude, il y avait déjà les bases : la lucidité, la mesure, l’esprit critique, la constance, et cette manière sobre d’avancer sans bruit mais sans renoncer.
La franc-maçonnerie n’a pas besoin de “candidats parfaits”. Elle a besoin de personnes capables de se confronter à elles-mêmes. Et toi, tu l’étais.
Voilà la raison.
Simple, nette, sans emphase.




