On entend souvent cette formule, dite avec un demi-sourire et une gravité de circonstance : « La franc-maçonnerie est une école de la vie. »
Très bien. Mais alors, soyons honnêtes : c’est une école où beaucoup veulent surtout… être professeurs.
L’ÉCOLE OÙ L’ON ENTRE AVEC DES CERTITUDES
Le profane s’imagine parfois qu’on y reçoit un diplôme de sagesse, une carte d’accès au grand sens caché, une sorte de “version premium” de soi-même. Et certains, à peine entrés, se découvrent soudain un talent : donner des leçons.
C’est amusant, d’ailleurs : plus on répète “humilité”, plus on a parfois envie d’expliquer aux autres comment s’y prendre.
On arrive avec des certitudes, puis on apprend le rituel.
On apprend le rituel… puis on confond “connaître” avec “comprendre”.
Et on confond “comprendre” avec “avoir raison”.
Bienvenue à l’école.

LA PREMIÈRE LEÇON : ON N’APPREND PAS À BRILLER, ON APPREND À POLIR
Là où la maçonnerie est cruelle (donc utile), c’est qu’elle ne promet pas le confort. Elle promet le travail. Pas le travail qui se voit, celui qui fait applaudir, celui qui donne un titre. Non : le travail ingrat, régulier, silencieux. Celui où l’on découvre que l’ennemi n’est pas “dehors”, mais dans nos automatismes : susceptibilité, vanité, impatience, besoin d’avoir le dernier mot.
En loge, on peut cacher beaucoup de choses.
Mais on ne peut pas cacher longtemps ce que l’on est.
La pierre parle. Toujours.
L’ÉCOLE OÙ L’ON APPREND À SE TAIRE… MAIS PAS À DISPARAÎTRE
Il y a un malentendu fréquent : croire que se taire, c’est s’effacer.
Non. Se taire, en loge, c’est apprendre à faire de la place. À laisser respirer l’autre. À laisser exister une idée sans la corriger. À écouter sans préparer sa réponse. À supporter la différence sans la réduire.
C’est une discipline. Et comme toute discipline, elle révèle ce que nous préférons cacher : notre besoin d’être reconnu, notre peur d’être insignifiant, notre faim d’avoir raison.
Dans cette école, le silence est un tableau noir : on y voit nos réflexes.
LA NOTE LA PLUS DIFFICILE : LA FRATERNITÉ
La fraternité, c’est joli sur un cordon. C’est impeccable dans un discours.
Mais dans la vraie vie d’une loge, la fraternité se mesure à des choses moins glorieuses :
- comment je parle de l’absent,
- comment je réagis quand on ne pense pas comme moi,
- comment je supporte une décision collective qui ne me convient pas,
- comment je sers sans être remercié,
- comment je corrige sans humilier,
- comment j’accueille sans classer.
La maçonnerie n’est pas une école de la vie parce qu’elle est parfaite.
Elle est une école de la vie parce qu’elle nous met face à nos imperfections… en groupe, ce qui est infiniment plus sportif.
L’EXAMEN FINAL : LE PROFANE NE DEVINE PAS CE QUE JE PORTE, IL VOIT CE QUE JE FAIS
Le grand piège, c’est de croire que l’initiation nous a “changé”.
Elle nous a peut-être réveillés. Mais changer, c’est autre chose.
Si la maçonnerie est une école de la vie, alors le diplôme ne se reçoit pas en fin d’année. Il se lit dans le quotidien :
est-ce que je suis plus juste ? plus calme ? plus fiable ? moins dur ? plus utile ?
Parce que le monde profane se moque de nos symboles. Il ne les voit pas.
UNE ÉCOLE… SANS RÉCRÉATION POUR L’EGO
Oui, la franc-maçonnerie est une école de la vie.
Mais pas une école où l’on vient décorer son personnage. Une école où l’on vient désapprendre : l’ego, l’orgueil, la posture, la comédie.
Et si, parfois, on se surprend à vouloir enseigner… tant mieux.
À condition de se souvenir qu’en maçonnerie, le meilleur professeur est souvent celui qui accepte de redevenir apprenti.
Parce qu’au fond, la seule vraie phrase à répéter, sans emphase, sans théâtre, et avec un peu de sourire, c’est celle-ci :
“Je travaille.”
Billet d’humeur maçonnique de GADLU.INFO




