Un livre essentiel pour comprendre le Régime Écossais Rectifié
Paru en 2021, L’épopée des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et de leur Profession, signé Dominique Vergnolle et Pierre Mollier, s’impose déjà comme une référence incontournable pour quiconque s’intéresse au Régime Écossais Rectifié (RER) et à son histoire singulière.
À travers une enquête historique minutieuse et passionnante, les auteurs retracent la lente maturation du système voulu par Jean-Baptiste Willermoz, figure lyonnaise majeure du XVIIIᵉ siècle et véritable architecte du Rectifié.
Willermoz : une quête guidée par une boussole intime
Dès son entrée en loge, Willermoz est convaincu que la Franc-Maçonnerie cache des vérités profondes, essentielles, capables d’éclairer l’initié sur sa nature et sa finalité. Cette intuition initiale deviendra sa boussole durant toute sa vie.
Son constat est sévère :
« La Maçonnerie était tombée dans l’anarchie et le plus grand discrédit. »
Les auteurs montrent comment, animé d’un sens aigu de la mission, Willermoz entreprend une réforme ambitieuse, destinée à redonner une âme à l’Institution en lui restituant son but primitif.
Naissance d’un ordre chevaleresque réformé
Le cœur du livre réside dans l’exploration du patient travail de Willermoz pour rénover un ordre chevaleresque existant, d’origine écossaise, et l’intégrer dans un nouveau système spirituel, moral et initiatique.
Les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte (CBCS) ne surgissent pas des brumes de l’histoire : ils sont le fruit d’une réélaboration profonde, nourrie par des dialogues avec les grandes puissances maçonniques européennes, mais aussi par les débats philosophiques et mystiques de l’époque.
L’ouvrage montre comment Willermoz s’appuie :
- sur les courants mystiques et illuministes,
- sur l’héritage templier revisité,
- sur la quête intérieure propre à la tradition chrétienne,
- et sur l’influence notable de Martinès de Pasqually et de la doctrine de la Réintégration.
La “classe secrète” : l’âme du système
Pour Willermoz, la Maçonnerie ordinaire n’est qu’un voile.
L’essentiel devait se trouver dans une classe secrète, dépositaire des vérités “rares et importantes” qu’il cherchait depuis toujours.
Cette dimension, souvent fantasmée ou mal comprise, est ici décrite avec précision :
- son origine conceptuelle,
- sa fonction initiatique,
- son rôle dans la cohérence du RER,
- et sa relation avec la doctrine martinésiste.
Les auteurs montrent comment cette classe secrète devait constituer l’âme du futur Régime, bien plus que ses formes chevaleresques ou symboliques.
Entre Lumières, mysticisme et politique : un projet fragile
Le XVIIIᵉ siècle n’est pas un décor neutre.
Les loges sont traversées par :
- les ambitions des différentes obédiences,
- les secousses des Lumières,
- l’émergence de courants ésotériques parfois concurrentiels.
Willermoz évolue au milieu d’un véritable tourbillon idéologique.
Les auteurs narrent avec brio les débats, résistances, alliances et incompréhensions qui ont façonné la naissance du Régime Rectifié.
Le grand enjeu : quel était le véritable but de Willermoz ?
La question centrale de l’ouvrage, habilement posée dès l’introduction, demeure :
Willermoz souhaitait-il créer une société chrétienne et patriotique de vertus, ou restaurer un ordre initiatique secret issu d’une filiation ancienne ?
Les auteurs ne tranchent pas de manière simpliste.
Ils explorent nuances, textes, correspondances et circonstances historiques pour offrir une analyse profonde de cette tension fondatrice du RER.
C’est l’une des grandes forces du livre :
il ne donne pas une réponse, mais révèle un processus vivant, porté par un homme animé d’une vision spirituelle exigeante.
Un ouvrage clair, documenté, et indispensable
Dominique Vergnolle et Pierre Mollier réussissent la prouesse de rendre accessible un sujet souvent considéré comme ardu. Leur travail combine :
- rigueur historique,
- clarté pédagogique,
- richesse documentaire,
- mise en contexte sérieuse,
- et profondeur initiatique.
Pour les Frères du Régime Écossais Rectifié, pour les historiens de la Franc-Maçonnerie et pour tous les passionnés de l’œuvre willermozienne, ce livre est un incontournable.
En conclusion : une épopée fondatrice enfin racontée
L’épopée des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte n’est pas seulement un livre d’histoire.
C’est une plongée dans le chantier le plus ambitieux de la Maçonnerie française : celui de la restauration d’un ordre spirituel cherchant à concilier chevalerie, mystique chrétienne, tradition initiatique et réforme maçonnique.
Un ouvrage lumineux, passionnant et essentiel pour comprendre ce qui fait encore aujourd’hui la singularité du Régime Écossais Rectifié.
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En Maçonnerie, la référence aux textes fondamentaux est nécessaire afin que soit comprise et intégrée la voie initiatique proposée. Le Rite Écossais Rectifié et le Régime qui lui sert de vecteur, se caractérisant par une cohérence exceptionnelle, n’y échappent pas.
Pierre Mollier, qui signe la préface souligne que le livre apporte « De nouvelles lumières sur la genèse du RER ». C’est ainsi que Dominique Vergnolle, s’appuyant aux meilleures sources dont certaines inédites, tel le fonds Charles de Hesse de l’Ordre Danois des Francs-maçons, commence par retracer l’histoire du Rite et de ces grades symboliques (Apprenti, Compagnon, Maître, Maître Écossais de Saint André), du Régime, de celle des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte (CBCS) puis celle de la naissance de la Profession.
Rappelons que l’Ordre Intérieur comprend un grade préparatoire, celui d’Écuyer Novice, et le grade ultime du Régime celui de CBCS qui constituent la classe chevaleresque. Au-delà, la classe sacerdotale, invisible et supposée secrète, des Profès et Grands Profès proposée par Jean-Baptiste Willermoz n’a pas été entérinée par le convent de Wilhelmsbad en 1782.
Le grand intérêt de ce passionnant ouvrage est de décortiquer la genèse de la Profession et Grande Profession qui ont succédé au Chevalier Profès, grade suprême de la Stricte Observance dite Templière, une des sources formelles du RER qui en a fourni le modèle organisationnel en six grades.
Dominique Vergnolle nous fait voyager à travers toute l’Europe des Lumières, de la maçonnerie réformée de Dresde au Convent des Gaules, en 1778, avec la première réforme de l’ordre Templier en France. Pour ensuite nous conduire à celui de Wilhelmsbad avec ses différents acteurs et sensibilités maçonniques. C’est ensuite, dans l’après convent, de 1782 à 1787, que sont adoptées diverses révisions et adoptions de rituels.
Si parmi les nombreux mystères de la franc-maçonnerie, il en est un qui fait encore couler beaucoup d’encre, c’est bien celui de cette classe. Cet ouvrage a aussi pour but de nous faire comprendre pourquoi et comment l’objectif assigné à cette classe, qui est de veiller à l’intégrité et favoriser la culture du dépôt inhérent au Saint Ordre primitif, a été mis en œuvre. Une galerie de portraits enrichit le dernier opus de Dominique Vergnolle qui publie régulièrement dans Les Cahiers Verts du Grand Prieuré des Gaules et dans le Bulletin de la Société Martinez de Pasqually. Il mettra raisonnablement fin, à la lumière de l’histoire, aux fantasmes que cette classe suscite encore.