Parmi tous les symboles qui habitent le Temple, l’Étoile Flamboyante est sans doute l’un des plus intimes. Elle n’éclaire pas le monde extérieur, elle éclaire l’homme lui-même. Elle n’est pas faite pour briller devant les autres, mais pour rappeler silencieusement à celui qui la contemple que la lumière véritable ne se reçoit pas : elle se cultive.
Se tenir devant cette étoile, c’est se souvenir que la Maîtrise n’est pas un état acquis, encore moins un titre, mais un cheminement intérieur. Nous ne sommes pas parvenus ; nous avançons. Nous ne savons pas encore ; nous apprenons. La franc-maçonnerie ne demande pas la perfection, mais la perfectibilité, c’est-à-dire la conscience vivante que nous pouvons toujours nous améliorer, un peu, aujourd’hui, puis encore demain.
L’HOMME AU CENTRE DE SA PROPRE TRANSFORMATION
L’Étoile Flamboyante se déploie en cinq branches. Chacune semble désigner l’homme dans sa posture la plus essentielle : debout, les bras et les jambes ouverts, la tête tournée vers le haut. Ce n’est pas une figure de conquête, mais une figure d’équilibre. L’homme n’y domine rien, sinon lui-même. La tête n’y est pas couronne, mais gouvernail ; elle n’est pas là pour écraser, mais pour orienter. L’intelligence n’est donc pas une arme, mais une lumière qui guide.
Certains voient dans cette étoile le microcosme du corps, d’autres celui de l’âme. Les deux se rejoignent. L’être humain n’est pas seulement matière, ni seulement esprit. Il est passage, lien, tension vivante entre les deux. Le travail maçonnique consiste à unir, à accorder, à rendre harmonieuses les forces qui nous traversent. L’Étoile Flamboyante nous rappelle que nous sommes un chantier en mouvement, un temple en construction, et que la lumière que nous cherchons ne vient pas de l’extérieur, mais du dévoilement lent de ce que nous sommes.
UNE LUMIÈRE QUI RÉVÈLE L’INTÉRIEUR
Dans le monde profane, la lumière sert à révéler les objets. Dans le Temple, elle sert à révéler notre vérité. L’Étoile Flamboyante n’éclairera jamais ce que nous montrons, mais ce que nous cachons. Elle nous renvoie à nos motivations, à nos peurs, à nos attachements. Elle nous apprend à distinguer ce qui en nous est réaction, ce qui est émotion, et ce qui est véritable sentiment. Elle invite à parler moins et à écouter davantage, non pour se taire, mais pour entendre réellement.
Être Maître ne signifie pas maîtriser les autres, mais se maîtriser soi-même. C’est apprendre à reconnaître l’élan de l’ego, à le laisser passer sans le nourrir. C’est apprendre à agir selon la justesse plutôt que selon l’orgueil. C’est apprendre à être présent, au travail comme en silence, dans la parole comme dans le regard. L’Étoile nous parle de mesure, de retenue, d’ajustement intime.
L’ART ROYAL COMME DISCIPLINE VIVANTE
Il est difficile d’être libre. Leibniz le rappelait : Dieu seul l’est absolument. L’homme ne l’est qu’en s’élevant au-dessus de ses passions. C’est une lutte quotidienne, discrète, invisible aux yeux du monde. Il ne s’agit pas de devenir un être parfait, mais un être vrai. L’Étoile Flamboyante ne promet pas la grandeur. Elle invite à la profondeur.
Elle demande à chacun de devenir un foyer de chaleur plutôt qu’un projecteur de lumière. Un compagnon de route plutôt qu’un guide. Un être en marche, humble, lucide, attentif. Rien de spectaculaire, rien d’héroïque. Simplement la fidélité à ce que nous savons être juste.
Lorsque l’Étoile scintille au-dessus du travail, elle nous rappelle que chacun porte en lui une lumière qui ne demande qu’à s’ouvrir. Non pour briller plus fort que les autres, mais pour éclairer à hauteur d’homme. Et cela suffit.
