Personne ne naît en haïssant autrui à cause de sa couleur de peau, de ses origines ou de sa religion. On apprend à haïr, et on peut apprendre à se haïr les uns les autres, mais on peut aussi apprendre à aimer !
Nelson Mandela (1918-2013)
La Franc-Maçonnerie, un ordre fondé sur l’égalité
Depuis la publication des Constitutions d’Anderson (1723), la Franc-Maçonnerie se présente comme une fraternité universelle. On y lit que l’Ordre « accueille des hommes de toutes nations, langues, lignées et religions ».
En théorie, aucune distinction de race, d’origine ou de condition sociale ne doit empêcher un homme – et plus tard, une femme – d’être initié.
Cet idéal repose sur le principe fondamental de la Maçonnerie : reconnaître en chaque être humain un frère ou une sœur en humanité.

Racisme : une définition nécessaire
Le racisme associe préjugés et discriminations fondés sur des différences réelles ou supposées. Il peut être :
- individuel, lorsqu’il se traduit par des attitudes de rejet ou d’hostilité ;
- institutionnel, lorsqu’il est intégré au fonctionnement des organisations ;
- structurel, lorsqu’il est enraciné dans l’histoire et les traditions d’une société.
Ces formes de racisme existent dans le monde profane, et il serait naïf de penser que la Franc-Maçonnerie, composée d’hommes et de femmes issus de ce même monde, en est totalement préservée.
Le racisme en Franc-Maçonnerie : a-t-il existé ?
Historiquement, oui. La Franc-Maçonnerie n’a pas toujours échappé aux clivages raciaux de son temps.
- Aux États-Unis, les loges dites « régulières » (relevant de la Grande Loge d’Angleterre) n’initiaient pas les Afro-Américains au XVIIIᵉ siècle.
- En réaction, fut créée la Prince Hall Masonry (1775), du nom d’un Noir libre initié dans une loge militaire britannique. Ce courant maçonnique noir s’est développé parallèlement aux loges blanches, marquant une séparation de fait au sein de la Maçonnerie américaine.
- Dans d’autres contextes, certaines obédiences ont toléré des attitudes discriminatoires, soit par exclusion implicite, soit par réticence à confier des charges à des frères issus de minorités.
Ces réalités montrent que si l’idéal maçonnique est universel, sa mise en pratique a parfois été limitée par les préjugés sociaux de chaque époque.
Des figures maçonniques issues des minorités
Malgré ces obstacles, de nombreux francs-maçons issus de minorités ethniques ont joué un rôle majeur dans l’histoire de la Maçonnerie et de la société.
- Prince Hall (1735-1807) : pionnier de la Maçonnerie noire aux États-Unis, il fit de son obédience un outil d’émancipation et de lutte pour les droits civiques.
- Martin Luther King Sr. (père de Martin Luther King Jr.), membre d’une loge Prince Hall, porta également le flambeau de la justice sociale.
- En Europe, plusieurs loges cosmopolites du XVIIIᵉ et XIXᵉ siècle accueillirent des hommes venus d’Afrique, des Caraïbes ou d’Orient, témoignant d’une volonté d’ouverture, même si ces initiatives restaient minoritaires.
Ces figures rappellent que la Franc-Maçonnerie peut être un levier puissant d’émancipation lorsqu’elle assume pleinement son idéal d’égalité.
Racisme explicite et racisme implicite
Il est utile de distinguer deux formes de racisme dans le contexte maçonnique :
- Le racisme explicite : refus d’initiation ou d’intégration pour des raisons liées à la couleur de peau ou à l’origine.
- Le racisme implicite : absence de diversité dans les postes de responsabilité, attitudes paternalistes, silences complices face à des propos discriminatoires.
Ce second aspect est le plus difficile à combattre, car il se dissimule derrière les usages ou les habitudes, tout en contredisant les principes fondamentaux de l’Ordre.
La Franc-Maçonnerie face à ses contradictions
Aujourd’hui, la plupart des obédiences affirment clairement dans leurs constitutions et déclarations que le racisme est incompatible avec l’idéal maçonnique.
Cependant, il ne suffit pas de proclamer l’égalité : il faut la vivre. La diversité doit être visible dans les loges, dans les responsabilités et dans les prises de parole.
Comme le disait Angela Davis : « Dans une société raciste, il ne suffit pas de ne pas être raciste, il faut être antiraciste. » Cela vaut aussi pour la Franc-Maçonnerie : l’inaction ou l’indifférence face aux discriminations équivaut à une forme de complicité.
L’enseignement initiatique : dépasser les préjugés
Le travail maçonnique invite chaque initié à tailler sa pierre brute, c’est-à-dire à examiner et corriger ses propres défauts. Les préjugés et les discriminations font partie de ces aspérités intérieures qu’il faut polir.
L’initiation nous rappelle que l’habit, la couleur de peau ou l’origine ne sont que des apparences : ce qui compte, c’est la lumière intérieure que chacun porte en lui.
Ainsi, le franc-maçon authentique ne peut tolérer le racisme, ni dans sa loge, ni dans la société.
Un combat qui reste d’actualité
Le racisme en Franc-Maçonnerie a existé, et il peut encore exister là où les idéaux proclamés ne sont pas vécus dans la pratique. Mais l’Ordre possède en lui les outils pour le dépasser : l’éducation, l’initiation, la fraternité et le rappel constant de l’égalité entre les êtres humains.
Être franc-maçon aujourd’hui, c’est prendre conscience que la lutte contre le racisme fait partie intégrante du chemin initiatique. Elle exige courage, cohérence et vigilance.
Le racisme n’a pas sa place dans le Temple.
Et le devoir du franc-maçon est de s’assurer qu’il disparaisse aussi du monde profane.
Texte inspiré par E. Figueiredo





Bien Compris,.