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Réflexion sur la communication

Mise en commun, telle est la définition de la communication. Toutefois il convient d’affiner cette définition. Cette mise en commun dans le cas particulier concerne la pensée et non les biens.

Bien des locutions contiennent le mot communication: Moyens de communications: transport, media de masse.

En avoir les moyens ne stipule pas forcement que l’on communique. On se met en condition. La communication stipule la distance. Sans distance, dans la superposition, dans la confusion, de deux individus, la communication est implicite car ce qui naît dans l’esprit de l’un est déjà chez l’autre. Ceci est purement théorique comme le serait l’autre extrême, la communication entre deux individus à distance infinie. La communication implique un émetteur et un récepteur. L’émetteur comme le récepteur doivent être « sur la même longueur d’onde », une façon de dire que le désir d’émettre comme celui de recevoir doit être bien présent. Un peu comme deux danseurs attendent à tour de rôle l’impulsion du partenaire pour danser en harmonie. La communication implique une aptitude à l’harmonie:

Le coup de foudre pourrait être cette harmonie instantanée dans le non dit, dans un geste, un visage, une mimique, une voix un parfum. Sinon la mise en condition implique d’abord un « je t’écoute » avant même un « je te parle ». La communication dont il est question ici est la communication verbale. Dans la chaîne d’union qui clôt les travaux, la communication se fait à travers le serrement plus ou moins fort de deux mains maillons vivants.

Dans l’état d’apprenti, la règle du silence, c’est un peu le «je me mets en condition » pour recevoir et je saurai, après, pour l’avoir vécu, quelle est cette oreille qui se prêtera à mon discours, lorsque passant de grade en grade, je serai délivré de la loi du silence pour à l’occasion, me l’imposer à moi-même, dans une sorte de remise à l’écoute. On ne peut parler et écouter en même temps. Et penser à ce que l’on va dire empêche d’écouter ce que l’Autre nous dit. Entre l’entendu et le parlé répondu, il me semble qu’un temps de réflexion de la part du répondant pour une mise en parole,et du parlant pour cette fois une mise à l’écoute, est nécessaire. Une réponse instantanée, un « du tac au tac » impulsif ne peut être que le fruit d’un malentendu, pire d’un non entendu.

Puisque Remy traitera de la communication, j’ai choisi de traiter de la Non Communication, comme complément à la communication, un peu la lune comme complément naturel au soleil, un peu le quatrième voyage, hors la loge comme complément aux trois voyages de l’apprenti ou la dernière imitation après les trois premiers grades, la nuit comme complément au jour pour passer de minuit, heure de la fin des travaux à midi, l’heure du début, un peu comme le gardé secret par rapport au dévoilé.

Ne pas communiquer c’est ne PAS mettre en commun. Pourquoi ne pas mettre en commun? Parce qu’on ne le VEUT pas? Parce qu’on ne le PEUT pas? Parce que c’est simplement IMPOSSIBLE? Ne pas communiquer, c’est ne pas mettre en COMMUN, c’est ne pas TRANSMETTRE. Mettre en commun, transmettre, deux critères de communication, sont pour l’un une tentative, pour l’autre une illusion. Mettre en commun, oui mais QUOI? Un sentiment? Une expérience objective? Un vécu, qui mêle sentiment et expérience objective. Mettre en commun oui, mais COMMENT? En gestes, en mots? Transmettre? Oui mais de qui a quoi? Ou de qui à qui? Mettre en mots justes ce que l’on pense et que l’on ne transmet donc pas.

L’indicible est forcément non communicable. L’indicible, c’est par définition, ce que l’on ne peut pas mettre en mots. Parfois, on peut dire mais en partie seulement. La description mise en mots est forcément réductrice. Toutefois, le problème de la communicabilité, ce n’est pas tant la communicabilité elle-même mais le contrôle qu’elle a bel et bien eu lieu. Seule la méthode scientifique, observatoire, reproductible, en est garante, mais dans une champ bien restreint.

Alors lorsqu’on demande à l’Initié ses impressions, il met en mot quelque chose de grouillant, de confus, de riche, de bouleversant, en un moment où peut-être encore le bouleversement qu’il vient de subir ne le lui permet que très imparfaitement. Nous essayons alors de retrouver dans ses mots quelque chose qui nous a touché lorsque nous étions en Initiation, en gestation d’Initié en quelque sorte communiquer, c’est peut être une réalité, peut être une illusion, selon le préjugé que l’on en a. Or être libre et de bonnes moeurs c’est ne pas avoir de préjugé. C’est probablement ne pas juger du tout. C’est s’abandonner à l’écoute. Etre libre, c’est un peu être libre de soi pour être libre avec l’autre, ce Frère qui nous attend.

Le problème du contrôle de la communication c’est de vérifier l’Intact du transmis, c’est donc la fidélité de l’oreille qui nous écoute et de la bouche qui reproduira En réalité , et c’est à mon avis l’essence même du Secret Maçonnique, les voyages mènent au Deuil, au Deuil de la communicabilité réelle, à l’acceptation une fois pour toute que la règle, c’est l’incommunicabilité, que l’exception, c’est la communication, et que même lorsqu’elle aura eu lieu, nous ne le saurons jamais vraiment. C’est dans notre condition de SOLITAIRE que nous travaillons. Solitaire oui mais Solidaire d’un même projet, la reconstruction du Temple, la Perfectibilité.

Source : http://www.fideliteprudence.ch

A.S.: