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PHILIP DE WHARTON, GRAND MAÎTRE – MISCELLANÉES MAÇONNIQUES

MISCELLANÉES MAÇONNIQUES par Guy Chassagnard

En franc-maçon de tradition, attaché à l’histoire de ce qui fut jadis le Métier de la Maçonnerie avant que de devenir la Maçonnerie spéculative des Maçons libres et acceptés, notre frère Guy Chassagnard met en chroniques ce qu’il a appris dans le temple et… dans les textes ; en quarante et quelques années de pratique maçonnique. Ceci selon un principe qui lui est cher : Apprendre en apprenti, comprendre en compagnon, partager en maître.


Chronique 80

1722 – Philip de Wharton, grand maître

 

Ainsi qu’en avaient décidé, en 1717, quatre loges londoniennes créatrices de la Grande Loge de Londres, il s’agissait de désigner chaque année à la Saint-Jean-Baptiste, un nouveau grand maître, membre si possible de la noblesse.

 

Le premier haut dignitaire porté à la grande maîtrise fut John, duc de Montagu (1690-1749) en 1721, le second Philip, duc de Wharton (1698-1731) en 1722. Ne devaient être ensuite grands maîtres que des seigneurs de haut rang.

 

Second duc de Montagu, John était chevalier de l’Ordre de la Jarretière et membre de la Royal Society lorsqu’il fut élu grand maître. Ce fut lui qui ordonna que fussent établies de nouvelles « constitutions » maçonniques.

 

Le mandat de Philip, qui avait été marquis et duc de Wharton, marquis de Catherlough, duc de Northumberland et pair de Grande-Bretagne avant que d’être franc-maçon, fut marqué par la révision et la publication du nouveau Livre des Constitutions du frère Anderson.

 

Le passage d’un duc grand maître à l’autre se fit dans de curieuses relations, que le révérend Anderson se plut à rapporter dans la seconde édition (1738) de son ouvrage et que nous ne pouvons rappeler qu’en quelques lignes :

 

** Le 25 mars 1722, il fut décidé de maintenir John, duc de Montagu, grand maître de la Grande Loge,

 

** Mais Philip, duc de Wharton, fait récemment Maçon, convoitant déjà la chaire de grand maître, sans même être maître de loge, réunit le 24 juin un certain nombre de frères qui le nommèrent grand maître.

 

** Pour mettre fin à un schisme naissant, le duc de Montagu dut se résoudre, le 17 janvier 1723, à descendre de son « trône » pour le laisser à son rival.

 

 


© Guy Chassagnard – Auteur de La France-Maçonnerie en question (Éditions Dervy – 2017) & du  Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie (Éditions Segnat, 2016).


 

A.S.:

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  • Un peu court mon cher Guy. Voilà ce que dit exactement et intégralement les Constitution de 1738.
    « Philippe, Duc de Wharton, récemment fait frère maçon , bien que n’étant Maître de loge, éprouva l’ambition de briguer la Grande Maîtrise. Il obtint le soutien d’autres frères à qui il donna rendez-vous à Stationer’s Hall le 24 juin 1722. Comme aucun Grand Officier n’était présent, ils mirent à la Présidence un ancien Maître de Loge, (mais qui n’était pas à ce moment Maître en chaire, ce qui était irrégulier) qui, sans lea Cérémonial requis, proclama à haute voix Philippe Wharton Grand maître des maçons, MM. Joshua Timson, forgeron et William Hawkins Maçon, Grands surveillants mais sans nommer de Député [(Adjoint]). La Grande Loge avait été ouverte et fermée sans les formes accoutumées. Cependant les Frères nobles et tous ceux qui n’acceptaient pas de telles irrégularités ne reconnurent pas l’élection de Wharton jusqu’à ce que le Frère de haute valeur Montagu comble la brèche faite dans la concorde en convoquant une Grande Loge à la « King’s arms tavern » pour le 17 janvier. »
    Le Duc de Wharton verra son élection confirmée à cette réunion du 17 janvier 1722/3 (quantième de l’année en calendrier julien et grégorien : les 2 chiffres figurent sur la promulgation), par le retrait du Duc de Montagu, sous la double condition de nommer Desaguliers Député Grand Maître et de promulguer les Constitutions.

    Le Duc de Montagu prendra sa revanche en présentant son cousin, le comte de Dalkeith, à l’élection de la Grande Maîtrise de juin 1723 et en annonçant à l’avance qu’il prendra Desaguliers comme Grand Maître adjoint.
    Les minutes de la Grande Loge relatent cet évènement et la division qui s’en est ensuivie où la nomination de Desaguliers comme Député Grand Maître a été votée à 43 pour contre 42. Le Duc de Wharton essaya de faire revenir la Grande Loge sur le vote, mais un des partisans de Desaguliers, le frère Robinson produit un texte du nouveau Grand Maître qui confirme le choix de Desaguliers et des Grands Surveillants. Puis…
    « And also Brother Robinson did, in this said Worship's Name and behalf of the whole Fraternity protest against the above proceedings of the late Grand Master in first putting the Question of Approbation, and what followed thereon,as unprecedented, unwarrantable, and Irregular, and tending to introduce into the Society a Breach of Harmony, with the utmost disorder and Confusion.
    Then the said late Grand Master and those who withdrew with him being returned into the Hall, and acquainted with the foresaid Declaration of Brother Robinson,
    The late Grand Master went away from the Hall without Ceremony.
    After other regular Healths Drank, The Lodge adjourned."»
    « Alors le Frère Robinson protesta au nom de sa Seigneurie et de toute la Fraternité contre la volonté de l’ancien Grand Maître de mettre en premier la question de l’approbation [du député Grand Maître] et déclara que, par la suite, cette action, sans précédent, injustifiée et irrégulière, risquait d’introduire dans la société une rupture de l’Harmonie avec les plus extrêmes désordre et confusion.
    Alors quand l’ancien Grand Maître et tous ceux qui s’étaient retirés avec lui, en revenant dans [Merchant] Hall, furent informés de la susdite déclaration du frère Robinson, l’ancien Grand Maître quitta le Hall de manière non protocolaire.
    Après avoir porté toutes les autres santés, la [Grande] Loge fut suspendue. »
    Cet extrait des minutes de la réunion de la Grande Loge (rédigées par Jean-Théophile Desaguliers) montre que ça ne s’est pas très bien passé avec le Duc de Wharton qui a quitté la réunion « sans protocole » (il a claqué la porte !) après plusieurs tentatives de faire revenir l’Assemblée sur le vote pour le couple Dalkeith/Desaguliers, ce qui révèle bien le désappointement du duc de Wharton et son animosité envers Desaguliers qui lui avait été imposé comme Grand Maitre adjoint en janvier 1723.
    Manifestement, le duc de Wharton, qui jouait à ce moment un double jeu au profit du prétendant, avait compris l’intérêt que la nouvelle Franc-Maçonnerie représentait pour le pouvoir Whig et avait essayé de l’affaiblir, voire de la faire trébucher. Mais il avait trouvé Desaguliers en travers de son chemin, lequel, avec le soutien du Duc de Montagu et de la Royal Society, a réussi à l’écarter.
    D’ailleurs, au « Quaterly » du 25 novembre 1723, le comte de Dalkeith, nouveau Grand Maître, après avoir confirmé le Dr Desaguliers dans ses fonctions, prononça l’exclusion du maître de la Loge « Kings Head » dans Ivy Lane, le Frère Huddleston, pour des propos calomnieux sur le grand Maître adjoint, le Dr Desaguliers, et l’a fait remplacer par son 1er Surveillant Mr Davis.