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LE TEMPS DES PERSÉCUTIONS – MISCELLANÉES MAÇONNIQUES

MISCELLANÉES MAÇONNIQUES par Guy Chassagnard

En franc-maçon de tradition, attaché à l’histoire de ce qui fut jadis le Métier de la Maçonnerie avant que de devenir la Maçonnerie spéculative des Maçons libres et acceptés, notre frère Guy Chassagnard met en chroniques ce qu’il a appris dans le temple et… dans les textes ; en quarante et quelques années de pratique maçonnique. Ceci selon un principe qui lui est cher : Apprendre en apprenti, comprendre en compagnon, partager en maître.

Chronique 127

1739 – Le temps des persécutions (1)

Avec sa bulle In Eminenti apostolatus specula, le pape Clément XII (1652-1740) a allumé la mèche des persécutions, tant religieuses que politiques ; exemples :

** 1739. – Selon un nouvel édit papal, tout propriétaire des États pontificaux qui reçoit des francs-maçons risque d’avoir sa maison détruite, et tout bon catholique se doit de dénoncer ceux qui pourraient se faire francs-maçons.

** L’Inquisition romaine condamne un ouvrage, intitulé Relation apologique et historique de la Société des Francs-Maçons (Dublin, 1738), à être brûlé, par la main du bourreau, sur une place publique ; au motif que celui-ci a pour mobile « d’enseigner et de contenir des propositions, une doctrine et des principes impies ». 

** Un certain frère Tommaso Baldassarre Crudeli (1703-1746) est arrêté à Florence pour avoir abrité dans sa maison des assemblées de francs-maçons. Il est emprisonné, mis à la question et condamné à une longue peine de détention. 

** Auguste III (1696-1763), électeur de Saxe et roi de Pologne, ordonne la fermeture de toutes les loges maçonniques et recommande l’exécution de la bulle du pape – qui sera affichée dans toutes les églises.

** 1740. – Un gazetin annonce l’arrestation de Jacques Christophe Naudot (c.1690-1762), auteur connu d’un recueil de Chansons notées de la Très Vénérable Confrérie des Maçons li­bres, avec cinq de ses frères francs-maçons. 

** Le comte Louis Alexandre de Mailly, époux de sa cousine Louise Julie de Nesle (1710-1751), maîtresse en titre de Louis XV, reçoit l’ordre de « sortir de Paris » pour avoir organisé chez lui un souper de francs-maçons.

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1739 – Le temps des persécutions (2)

** 1740. – Une lettre royale, adressée au préfet général de police, Claude Henry Feydeau de Marville – gendre et successeur de René Hérault –, enjoint à celui-ci de « faire des visites de jour et de nuit » dans toutes les maisons où il se tiendra des assemblées suspectes.

** Philippe V, roi d’Espagne (1693-1746), prend un édit con­tre les francs-maçons ; plusieurs d’entre eux sont jetés au cachot. L’In­quisition découvre une loge à Madrid dont tous les membres sont arrêtés et certains condamnés aux galères.

** Les assemblées de francs-maçons sont interdites sur l’île de Malte où l’Ordre hospitalier et militaire fait placarder la bulle du pape Clément XII.

** 1742. – Selon un mandement de Mgr Henri François Xavier de Belsunce (1671-1755), évêque de Marseille, « nul ne peut garder le silence sur une bizarre et mystérieuse association qui commence à s’établir dans cette ville et qui y fait tant de bruit », et dont les membres « se font un faux honneur de leur dé­sobéissance et employent les sollicitations les plus pressantes pour grossir le nombre de leurs associés ».

** L’intendant de Guyenne adresse au frère Arthur Cope, vénérable de la loge L’Anglaise, la sommation de fermer son local des Chartrons : « Je vous défends, y dit-il, de la part du Roy, d’y tenir à l’avenir aucune assemblée sous prétexte de réception ou autrement. »

** 1743. – Une centaine de grenadiers, envoyés par la reine Marie Thérèse (1717-1780), envahissent à Vienne une maison où se tient une assemblée de la loge Aux Trois Canons.  Trente francs-maçons sont arrêtés et emprisonnés ; ils ne seront libérés que quelques mois plus tard, le jour de la fête de la souveraine.

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© Guy Chassagnard – Auteur de  :

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A.S.:

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  • Merci de toutes ces précisions dont j'avais certains les éléments, mais pas tous. (Cf sur le sujet le très intéressant ouvrage de Jean-Paul Lefebvre-Filleau et in fine le mien).
    En France, les persécutions policières ont commencé avant la bulle du pape dès 1737:
    « Paris, 23 juillet Le lieutenant Général de Police, assisté d’un détachement de la force publique, s’est rendu dans une Loge de Francs-Maçons, où après avoir forcé la porte il a emporté tous les signes de leur ordre, tels que truelles, tabliers de cuir, maillets, registres de réception etc. avec une stricte interdiction à toutes les tavernes, réfectoires et autres cantines etc. de les recevoir. » (Derby Mercury août 1737)
    "Lettre de Paris, daté du 3 août.
    Le courrier du jour nous donne un rapport sur un acte totalement arbitraire, je veux dire l’enfoncement de la porte d’une loge de Francs-maçons à Paris, par le Lieutenant Général de Police. Les discours sur cet événement sont très divers ; certains disent que l’inquisition à Florence a obtenu par la torture des aveux des frères emprisonnés quelques semaines dans cette ville et aurait envoyé à notre Cour [celle de louis XV] un rapport sur ces révélations : Mais qu’il y ait ou non une quelconque vérité dans ce rapport, le clergé a déclaré une guerre totale contre toute la Franc-maçonnerie et, au-delà de la position du Clergé, le peuple regarde les Francs-maçons comme des hérétiques et des gens dangereux pour la société. Mais sans vouloir insister outre-mesure sur cette opinion, les Francs-maçons sont sans doute quelque peu insensés de penser établir des Loges dans un pays soumis à un gouvernement arbitraire, spécialement dans celui où existent l’inquisition et la Bastille »
    En Autriche, la clémence relative de l'archi-duchesse s'explique sans doute parce que son époux François-Etienne était lui-même franc-maçon.

    Cette véritable persécution politico-religieuse (on ne sépare pas encore les deux) montre bien l'originalité et la modernité de la nouvelle Franc-maçonnerie. Jamais les corporations médiévales et leurs "Old charges" n'on fait l'objet de telles poursuites.