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LA GRANDE LOGE D’ÉCOSSE – MISCELLANÉES MAÇONNIQUES

MISCELLANÉES MAÇONNIQUES par Guy Chassagnard

En franc-maçon de tradition, attaché à l’histoire de ce qui fut jadis le Métier de la Maçonnerie avant que de devenir la Maçonnerie spéculative des Maçons libres et acceptés, notre frère Guy Chassagnard met en chroniques ce qu’il a appris dans le temple et… dans les textes ; en quarante et quelques années de pratique maçonnique. Ceci selon un principe qui lui est cher : Apprendre en apprenti, comprendre en compagnon, partager en maître.

Chronique 109

1736 – La Grande Loge d’Écosse

Ultime rencontre avec les Sinclair de Roslin, en 1736, à Édimbourg, à l’occasion de la création de la Grande Loge d’Écosse. Dans un premier temps, William Sinclair de Roslin (1680-1762), qui n’a pas d’héritier, décide de se libérer de sa charge héréditaire de protecteur et de grand maître des maçons écossais – dont certains sont encore opératifs.

« Moi, William Saint-Clair [Sinclair] de Roslin, […] je déclare renoncer, dès aujourd’hui et pour toujours, à tous et à chacun des droits, prétentions ou prérogatives quelconques que mes ancêtres ainsi que moi-même ont eus ou peuvent avoir sur le patronat, le protectorat, la fonction de juge ou la dignité de Grand-Maître des Maçons en Écosse. »

La renonciation de William Sinclair est acceptée par les représentants des 32 loges écossaises qui ont été rassemblés dans la Mary’s Chapel d’Édimbourg. Mais le seigneur de Roslin est aussitôt élu grand maître pour la première année d’activité de la nouvelle institution.

À sa mort, survenue en 1778, le 32e grand maître, John Murray, 4e duc d’Atholl, rendra hommage à « une maison ancienne et célèbre dont les membres ont souvent versé leur sang pour la patrie », et à un homme de distinction qui « employa toute son influence et tout son crédit pour répandre l’esprit de la Maçonnerie et pour augmenter le nombre de ses membres ». Il n’est pas vain d’affirmer que les Sinclair, qu’ils aient été de Roslin ou d’autres fiefs, ont bien marqué de leur empreinte l’histoire de l’Écosse, et incidemment l’évolution maçonnique opérative écossaise. Car avant d’être spéculative, la Franc-Maçonnerie a bien été opérative ; les Sinclair en ont donné une preuve irréfutable.

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© Guy Chassagnard – Auteur de  :

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A.S.:

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  • Pas du tout.
    Aucune mention, aucune référence, dans les articles de journaux couvrant la période retenue sur le développement de la Grande Loge d’Angleterre ne corrobore cette prétention.
    En revanche, après la première visite en 1721 de Desaguliers en Ecosse, aux titres d’homme de science et d’ingénieur, au cours de laquelle il a expliqué le nouveau rituel aux membres de la Loge St. Mary’s Chapel à Edimbourg et « fait maçon » le lord-maire de cette ville et tous les membres de son conseil, un certain nombre de loges d’obédience anglaise se sont ouvertes dans le royaume d’Ecosse.
    En voici, parmi d’autres, trois exemples :
    Dans cet extrait du Calédonian Mercury de 1733 , présence à une tenue de James, 7ème duc de Strahtmore, 15ème Grand Maître de la Grande Loge d’Angleterre.

    « Ce mercredi, dans une loge de Maçons libres et acceptés (Le très honorable comte de Strathmore, grand Maître étant présent), de nombreux nobles et personnes de qualité ont été admis membres de cette ancienne et honorable Société. »
    Dans le Caledonien Mercury de 1736

    « Montrose 1735.
    Le jour de la Saint jean, une très belle procession des Francs-maçons de la Loge de Montrose a traversé la ville, à laquelle participait un nombre considérable de Gentlemen de la même société dans la ville ou aux alentours, tous en gants blancs et tabliers blancs selon leur coutume digne d’éloges, avec hautbois, violons et autres instruments de musique en tête de cortège. Ils se rendirent ensuite dans le même dispositif chez M. Moir, marchand de vin de son état (qui est Franc-maçon) et eurent ensuite un splendide divertissement et portèrent des santés à tous les Francs-maçons de Grande Bretagne, y compris les maîtres des Loges, et un grand nombre d’autres santés. Pendant la réunion l’orchestre jouait que Dieu nous préserve longtemps. »

    Et le Calédonian Mercury de 1737, quelques mois après la création de la Grande Loge d’Ecosse en 1735.

    « Nous apprenons qu’à Inverness, au 27 du mois courant, jour de la St-Jean, l’honorable et ancienne Fraternité des Francs-maçons de la ville a fait une procession de leur Loge vers la croix d’une manière convenable et règlementaire, la plus magnifique qu’on ait jamais vu ici, tous portant leurs gants blancs et leurs tabliers et les insignes appropriés de la Maçonnerie. Le Maître de la Loge marchant en tête de cortège et les surveillants en queue. La solennité de ce jour se conclut par un splendide divertissement et un bal pour les dames, où des santés furent portées au Grand Maître William Sinclair de Rosline et à beaucoup d’autres frères de grande valeur et la nuit se passa d’une manière affectueuse et fraternelle. »
    Effectivement la Grande Loge d’Ecosse est fondée en 1735 et procède à l’élection de son Grand Maître St Clair de Roslin.
    Dublin gazette

    « Mardi dernier, jour de la St-André (saint patron de l’Ecosse) il y eut une réunion des Maîtres et surveillants de près de quarante loges régulières à St Marie Chapel de la très ancienne et honorable Société des Maçons libres et acceptés qui ont à l’unanimité élu St Clair de Roslin , esquire, Grand maître de toutes les loges d’Ecosse, lequel après l’élection a nommé son Député, les grands surveillants et les autres Officiers. »
    Si, incontestablement, la Grande Loge d’Ecosse porte la marque de fabrique de la grande Loge d’Angleterre : « la très ancienne et honorable Société des Maçons libres et acceptés », et revendique la maîtrise sur toutes les loges d’Ecosse, elle s’en distingue par deux éléments : sa fête annuelle est à la St André et pas à la St Jean et elle réunit 40 loges où semble se mélanger des loges spéculatives à l’anglaise et des loges opératives du royaume d’Ecosse. Ce qui suppose que d’autres Loges ont voulu rester à l’extérieur de la Grande Loge, dont la fameuse loge de Kilwinning.
    Calédonian Mercury 1743

    « NOTIFICATION
    L’ancienne Loge de Francs-maçons de et à Kilwinning, dont le très honorable Alexandre, comte d’EGLINTON est le très estimable Maître, informe par la présente que la réunion annuelle se tiendra à Kilwinning, mardi 20 décembre 1743, pour tous les membres qui souhaitent y assister, et, pour les autres, demande que des excuses raisonnables soient adressées directement, port payé, à M. David Logan senior à Kilwinning.
    Il est entendu que les Loges qui ont reçu leur constitution de Killwinning doivent envoyer leur délégué conformément à leur charte ou des excuses en la forme ci-dessus indiquée. »
    A l’évidence, Kilwinning s’était constituée en « mère loge » en s’arrogeant le droit de « constituer » des Loges. Il y a eu des mesures de rétorsion puisqu’un article du Newcastle Courant de 1741 nous apprend que des Frères ont quitté Kilwinning et fondé une loge concurrente qu’ils ont appelé « Vernon Kilwinning » du nom de l’amiral Vernon héros de la « Home fleet ».
    Cette cohabitation des structures et des loges opératives de l’ancien système Shaw va marquer le positionnement de la Grande Loge d’Ecosse qui fera une place dans ses manifestations aux maçon opératifs et qui introduira le terme de « Craft » le métier, totalement inusité dans la Grande Loge d’Angleterre.
    L’extrait de presse suivant qui relate l’élection comme Grand Maître du duc de Morton, succédant au comte de Kintore, est très significatif de ce point de vue. D’abord le comte de Morton élu est membre de la Royal Society et connait bien le duc de Montagu . Il sera également élu en 1741, 23ème Grand Maître de la Grande Loge d’Angleterre : un parfait profil de « Moderne ».
    Ensuite, l’article décrit le cérémonial selon le même processus qu’à la Grande Loge d’Angleterre avec la même terminologie. 50 loges, 10 de plus, participent à la cérémonie, Avec une convivialité bien arrosée et même des accents patriotiques.
    Mais la fête annuelle fait une place à la maçonnerie opérative en consacrant une partie du fond de charité au financement de l’apprentissage et en notant que pairs et opératifs ont participé sur un pied d’égalité au dîner de clôture : du jamais vu à la Grande Loge d’Angleterre !

    Caledonian Mercury

    Cette volonté d’englober la maçonnerie opérative dans la fraternité de la Grande Loge va se confirmer au fil des années : Un événement significatif à cet égard sera la mise en chantier de l’infirmerie d’Edinbourg où, pour la pose de la première pierre, se sont réunis les représentants des loges des maçons libres et acceptés et les maçons opératifs. (Newcastle courant 1738).
    Ainsi que cet entrefilet du Caledonian Mercury de1740.

    « Hier, à l’Assemblée trimestrielle des Francs-Maçons qui s’est tenue à St Mary Chapel in Nidry’s Wynd, la Grande Loge, en témoignage de son respect sincère envers le métier a éteint [la dette ?] d’Alexandre Ramsay, auparavant maçon opératif, envers l’apprentissage et a payé les droits usuels de l’apprenti au diacre Thomas Miln, Franc-Maçon à Edinbourg et actuel trésorier de la grande Loge. »
    Dans le Scott magazine du 3 septembre 1753, l’article donne l’ordonnancement de la procession des Francs-Maçons qui commence par des maçons opératifs, mentionnés comme tels dans le texte.
    La grande Loge d'Ecosse est donc bien une émanation de la Grande Loge d'Angleterre, mais elle a fait une place en son sein pour les anciennes loges opératives,

    Cette particularité de la Grande Loge d’Ecosse a dû frapper Laurence Dermott quand il a fondé la Grande Loge des Anciens Acceptés en 1752. Il s’est appuyé sur le modèle écossais pour élaborer sa mythologie des « old charges », censées être les véritables racines de la Franc-Maçonnerie. En ce sens, l’origine écossaise de la Maçonnerie n’est pas complètement infondée si l’on s’en tient à la Maçonnerie des « Anciens Acceptés » qui en 1813 l’emportera sur celle des Modernes. Mais elle ne peut englober toute la Maçonnerie et notamment la Grande Loge des Modernes qui n’a rien emprunté à l’Ecosse et y a, au contraire, fondé la Grande Loge d’Ecosse.