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1745 – LA DESCENTE DE POLICE INUTILE – MISCELLANÉES MAÇONNIQUES

MISCELLANÉES MAÇONNIQUES par Guy Chassagnard

En franc-maçon de tradition, attaché à l’histoire de ce qui fut jadis le Métier de la Maçonnerie avant que de devenir la Maçonnerie spéculative des Maçons libres et acceptés, notre frère Guy Chassagnard met en chroniques ce qu’il a appris dans le temple et… dans les textes ; en quarante et quelques années de pratique maçonnique. Ceci selon un principe qui lui est cher : Apprendre en apprenti, comprendre en compagnon, partager en maître.

Chronique 152

1745 – La descente de police inutile

C’est encore à Pierre Chevallier que l’on doit de relater cette autre affaire dans le détail (Histoire de la Franc-Maçonnerie française, 1974) : 

Au cours de l’été 1745, les surveillances des activités maçonniques parisiennes s’intensifient. Mais aucun événement important ne se produit, en dehors du fait que le marquis de Livry, premier maître d’hôtel du roi, ne soit contraint de dé­sa­vouer devant le lieutenant de police, Feydeau de Marville, son propre intendant qui a subrepticement tenu loge en son château.

Le 5 septembre, toutefois, le commissaire Delavergée, reprenant ses visites domiciliaires, se rend à la maison du sieur Pique, huissier audiencier au Châtelet ; maison située dans la grande rue des Martyrs, dans laquelle se tient « une assemblée de freys-maçons pour la réception de deux personnes en icelle ». 

Treize personnes se trouvent réunies dans la maison, appartenant aux professions les plus dignes de la bourgeoisie : un huissier, un médecin, plusieurs procureurs, etc.

Le procès verbal du commissaire n’omet rien dans la description des contrevenants, ou des ustensiles maçonniques trouvés sur les lieux. Il est dûment accompagné de pièces justificatives susceptibles d’entraîner des comparutions au Châtelet suivies de condamnations appropriées. 

Sauf que le sieur Pique, vénérable, est lui-même membre du Châtelet et que sa maison n’est en aucune façon un lieu public…

« Condamner Pique, nous dit Pierre Chevallier, c’est faire jurisprudence et ne plus tolérer que les grands seigneurs tiennent loge à leur gré dans leurs hôtels.  […] Une tolérance de fait s’établit donc, et ce sera désormais la doctrine constante du pouvoir royal à l’égard de l’Ordre. » 

Descente de police à l’hôtel de Soissons où se tient une assemblée de loge. Le procès verbal, dressé par le commissaire De­­lavergée fait état de l’habillement insolite des participants – ceints d’un tablier de peau blanche – ainsi que des ustensiles en usage. 

Le secrétaire d’État Maurepas en réfère au roi. Quant au traiteur, nommé Leroy, il se verra infliger, au Châtelet le 18 juin, une amende de 3 000 livres.

• 18 juin. – Agissant en qualité de conseiller du Roi et de lieutenant-général de la police de Paris, Claude Henry Feydeau de Marville, chevalier, comte de Gien, rend une « sentence qui renouvelle les défenses à toutes personnes de s’assembler ni de former aucune association, et aux cabaretiers, traiteurs et au­tres de les recevoir chez eux ; et con­damne le nommé Leroy, traiteur, à 13 000 livres d’amende pour avoir contrevenu aux susdites défenses ».

• 5 septembre. – Nouvelle descente de police, cette fois-ci dans la gran­de rue des Martyrs, à Montmartre. Mais le maître de la loge, le frère Pique, se trouve être huissier et audiencier au Châtelet. Compte tenu de la personnalité de l’intéressé, et du fait que la réunion a lieu à son domicile, l’af­faire est classée sans suite.

• 20 octobre. – Création à Versailles de la Loge de la Chambre du Roi. Jean-Émile Daruty précise dans un ouvrage paru en 1879 : « La Grande Loge Anglaise [de France] constitue à Paris une loge qui y est fondée, sous le nom de Loge de la Chambre du Roi par les officiers attachés au personnel de la maison du Roi ; parmi eux se trouvent un aumônier du Roi et plusieurs capucins. » La police n’intervient pas…

Cette loge deviendra, sous le règne de Louis XVI, la Loge militaire des Trois Frères Unis, à l’orient de la Cour.

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© Guy Chassagnard – Auteur de  :

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A.S.: