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Le rôle de la franc-maçonnerie dans la Révolution française

Petite retour en 2003 pour la lecture de cet article paru sur le site de « Science et Avenir » qui est un entretien avec Roger Dachez, médecin, historien et franc-maçon et président de l’Institut maçonnique de France (fondé en 2002).

Entretien portant sur le rôle de la Franc-Maçonnerie dans et durant la Révolution Française : entretien fort intéressant avec Roger Dachez, universitaire, historien de la médecine mais  aussi l’un des historiens reconnus de la franc-maçonnerie.….

Intitulé de l’article :  » « Les francs-maçons ont été autant guillotinés que guillotineurs » »

Source : http://www.sciencesetavenir.fr/magazine/dossier/091356/les-francs-macons-ont-ete-autant-guillotines-que-guillotineurs.html

Quel fut le rôle exact de la maçonnerie dans la Révolution française ?Réponse avec l’historien Roger Dachez qui trace ici un portrait renouvelé de l’ordre au XVIIIe siècle.

  • Sciences et Avenir : Vous êtes spécialiste du siècle des Lumières. Comment s’inscrit la maçonnerie dans la Révolution

  • Roger Dachez : La thèse classique du XIXe siècle, soutenue jusqu’aux années 1970, désignait la maçonnerie comme l’une des sources de la Révolution française. Dès 1795, des théories contre-révolutionnaires la dénonçaient même comme sa principale instigatrice. Or l’examen critique de l’ordre entrepris il y a trente ans a considérablement modifié cette vision. L’évolution politique d’une maçonnerie abritant des milieux ou des courants authentiquement révolutionnaires et qui vont militer franchement pour l’établissement de la République, c’est exact, mais après 1830, lors de la Révolution de 1848. C’est d’ailleurs à partir de cette période que la maçonnerie revendique cet héritage.


Une nouvelle « école » alors ?
Il y a aujourd’hui un certain accord pour reconnaître que la maçonnerie française n’a pas eu le rôle dans la préparation et le déroulement révolutionnaire que la littérature lui a prêté. Avant le retour des « archives russes », on disposait des documents confisqués et transportés à la Bibliothèque nationale, ainsi que du fonds du maçon Willermoz, à Lyon (1750-1824). Leur étude avait permis de constater que le rôle de la maçonnerie dans le déclenchement de la Révolution était différent de la vision que l’on en avait.

On ne peut néanmoins lui retirer sa participation à la Révolution ?

Bien sûr que non. Mais on pense aujourd’hui que la maçonnerie, la sociabilité maçonnique, avec ses caractéristiques de tolérance, d’écoute et d’effacement des barrières sociales, sont plus un symptôme de l’évolution générale de la bourgeoisie et de l’aristocratie française de la seconde moitié du XVIIIe siècle, qu’une cause de cette évolution. Surtout, une cause de la Révolution française.

Qui est franc-maçon à la Révolution ?
Des hommes qui se partagent dans tous les camps. Chez les révolutionnaires et les contre-révolutionnaires. Ils ne se déterminent pas en fonction de leur commune appartenance maçonnique, mais en fonction des intérêts de leur classe et de leur milieu. Il y a des guillotineurs, des guillotinés, des réactionnaires, des révolutionnaires extrémistes. Toutefois, un certain nombre de choses restent vraies. La maçonnerie est un lieu où des gens se sont rencontrés pendant des années sur un pied d’égalité. Cela dit, la Révolution se propagera bien plus dans d’autres lieux, notamment les « cabinets de lecture », où il n’est pas rare de rencontrer des maçons.

Le public a souvent du mal à comprendre que l’on ait pu être franc-maçon et membre de la noblesse. A ce propos, qu’en a-t-il été du roi Louis XVI ?
Louis XVI n’a pas été maçon. En revanche, son frère le comte d’Artois, futur Charles X, a été initié. Charles X provoquera la chute définitive et la fin des Bourbons. Louis XVIII, second frère, a aussi été maçon quand il était comte de Provence, dans les années 1777-1778. Le cas de Louis XV (en 1743) a été évoqué. Tout son entourage était initié.

Qui sont les premiers maçons ?
Rappelons que 1725-1750 sont des années assez obscures. Greffe venue d’Angleterre, la « première maçonnerie française » est une maçonnerie d’aristocrates, la plupart anglais, écossais et irlandais émigrés à cause d’une querelle dynastique. Les Français ne s’y joindront qu’ensuite. Distinction sociale oblige, des loges d’aristocrates et de bourgeois se constituent, de la même façon que dans la maçonnerie militaire existent des loges d’officiers et de roturiers.

Certains ouvrages citent Danton ou Camille Desmoulins comme maçons…
Dans une sorte d’enthousiasme historique, on a prêté à certaines personnes la qualité maçonnique. Or c’est en vain que l’on a cherché les traces de ces filiations.

Qu’attendez-vous du « fonds russe » datant du XVIIIe siècle ?
Il faut d’abord être très prudent parce que l’exploitation complète de ce nouveau massif de ressources demandera des années. Si l’on y a trouvé de fort belles pièces, mon sentiment est que cela ne bouleversera pas l’idée que l’on se faisait de la maçonnerie à l’époque. En dehors de ce fonds de grande valeur, il demeure les documents de la Bibliothèque nationale et ceux de Lyon. Pendant cinquante ans, on a pu se forger une image assez juste de la maçonnerie du XVIIIe siècle. En revanche, ces nouveaux documents vont permettre aux historiens du XVIIIe siècle de résoudre une série de petites énigmes, de problèmes ponctuels à l’histoire maçonnique. On va aussi récupérer, du point de vue du patrimoine, des manuscrits et des sceaux de grande beauté. Mais, et je le répète – sous bénéfice d’inventaire -, je ne pense pas que cet apport transformera ce que l’on sait.

Que devient la franc-maçonnerie pendant la Révolution ?
La Révolution, c’est la mort de la maçonnerie. Fin 1793, plus aucune loge ne fonctionne en France. Elles ne se relèveront péniblement qu’en 1796, après l’affermissement du Directoire, quand la Terreur aura disparu.

Et l’Amérique de Benjamin Franklin ?
Si la maçonnerie américaine a changé de nature vers 1840, auparavant, elle était aussi diverse que la française. On peut d’ailleurs se référer à l’amitié de La Fayette et Washington, tous deux francs-maçons. N’oublions pas que c’est en habit de maçon que George Washington posera la première pierre du Capitole, et qu’aujourd’hui encore, chaque président des Etats-Unis prête serment sur la Bible – maçonnique – de Washington… C’est d’une loge de Boston que la guerre d’Indépendance américaine débute. Tous les protagonistes sont maçons. Benjamin Franklin, le premier, prend son bâton de pèlerin pour venir en France convaincre Louis XVI de s’engager dans le soutien aux insurgés, contre le terrible ennemi commun anglais. Franklin ramènera avec lui La Fayette. Les pères fondateurs de la nation américaine sont tous maçons.Propos recueillis par B. A.

* Auteur d’Histoire de la franc-maçonnerie fran-çaise, Que sais-je ? PUF, à paraître en mars 2003

Bernadette Arnaud

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