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FRANC-MACON ! REGARD ACTUEL SUR UNE INSTITUTION CENTENAIRE


La nouvelle proposition d’exposition du Palau Robert présente un voyage passionnant à travers l’histoire, les caractéristiques et les singularités de la franc-maçonnerie, une institution qui a ses racines au XIe siècle mais s’est développée telle que nous la connaissons depuis le début du XVIIIe siècle.

Un article du site Catalan GENDCAT.CAT

« Maçons ! Regard actuel sur une institution centenaire»

Promu par la Direction générale de la diffusion avec la collaboration de la publication Sàpiens et organisée par le journaliste Enric Calpena, l’exposition a eu les conseils et la complicité de personnes proches et liées à la franc-maçonnerie, comme Josep Brunet, franc-maçon et patron de l’Arús Bibliothèque, fondée par Rossend Arús, personnage historique de la franc-maçonnerie catalane du XIXe siècle.

La devise de la bibliothèque dirigée par Brunet est aussi belle que dangereuse pour les défenseurs de l’autoritarisme : « Plus un peuple est éclairé, plus il est éloigné de l’absolutisme.

Les composantes de la franc-maçonnerie se définissent comme libres penseurs et, pour cette raison, ont historiquement été perçues négativement par ceux au pouvoir. La discrétion entourant leurs pratiques a souvent été rendue secrète par les persécutions qu’ils ont subies.

Du 13 mai au 28 août, en salle 1 du Palau Robert

Au Moyen Âge, le savoir ne circulait pas librement. Le savoir n’était transmis, discrètement, qu’à ceux qui faisaient partie d’un certain cercle. L’une de ces connaissances presque secrètes était la construction de grands édifices.

Les maîtres bâtisseurs et les différents types de maçons se partageaient l’usage d’instruments et de techniques précises et particulières qui garantissaient que les nefs des cathédrales, les tours des châteaux ou les voûtes des palais étaient monumentales et ne tombaient pas.

En France ces bâtisseurs s’appelaient des maçons , et leurs groupes s’appelaient des loges . Ces groupes – la franc-maçonnerie – se sont répandus dans une grande partie de l’Europe. Les maçons partageaient des rituels, des secrets et surtout le sentiment d’appartenir à une sorte de grande fraternité universelle.

Au XIVe siècle, le nom de tailleur de pierre apparaît en Angleterre . Les francs-maçons admettront de plus en plus de professionnels non directement liés à la construction : avocats, propriétaires, bourgeois… Des personnes pour qui les valeurs de fraternité et de discrétion et les rituels de la franc-maçonnerie ont un sens qui va au-delà du partage des techniques de construction des grands édifices.

Au début du XVIIIe siècle, la franc-maçonnerie change définitivement et devient plus réflexive et spéculative. Peu de temps après la création de la première loge moderne, la Grande Loge d’Angleterre, deux de ses membres rédigent leurs statuts, qui seront utilisés à partir de ce moment par les maçons du monde entier.

La libre discussion, la réflexion et le désir de transformer la société rendront la franc-maçonnerie partout dans le monde attrayante pour beaucoup et très dangereuse pour les autres. Depuis 300 ans, les francs-maçons ont été à l’avant-garde de certains des événements les plus importants, des révolutions, des transformations sociales… Mais ils ont également été persécutés et accusés d’être des conspirateurs, des carriéristes et d’être à l’origine de révolutions, d’attentats et de guerres.

Inspirateurs des révolutions américaine et française, les francs-maçons, sans le vouloir, ont été protagonistes dans l’ombre des grands événements des trois derniers siècles. Après la guerre civile, les francs-maçons ont été intensément persécutés en Espagne. Ils n’ont pas complètement disparu, mais ils ne se sont pas rétablis jusqu’à ces dernières décennies, notamment en Catalogne. Dans notre pays, certains des francs-maçons les plus remarquables étaient des personnes à la fois illustres et très différentes :

Jeanne Premier (1814-1870). Le soldat et homme politique le plus décisif du XIXe siècle en Espagne. Il a participé à toutes les guerres et conspirations de cette époque. Il atteint le 18e degré de franc-maçonnerie à la loge Tolérance et Fraternité de Madrid. Il a été enterré après une cérémonie d’adieu maçonnique.

Clotilde Cerda (1861-1926). À la suite d’une relation extraconjugale entre la femme d’Ildefons Cerdà, Clotilde a été rejetée par son père légal. En grandissant, elle était la harpiste la plus célèbre du monde. De plus, elle s’est distinguée dans la défense des droits des femmes, dans la lutte contre l’esclavage et dans les revendications sociales. Elle était franc-maçon d’adoption de la Loyalty Lodge de Barcelone à partir de 1881.

Luis Companys (1882-1940). Le président de la Generalitat pendant la guerre, torturé et fusillé par le régime franquiste. Companys, disciple de Francesc Layret, a travaillé pendant de nombreuses années comme avocat du travail jusqu’à l’arrivée de la Seconde République. Il est initié à la loge Loyauté en 1922.

La même chose se produit, à plus forte raison, à l’échelle internationale, où des personnalités de divers domaines sont également des francs-maçons convaincus. En France, aux États-Unis, en Allemagne et en Grande-Bretagne, des protagonistes de l’histoire font partie de l’Ordre :

Charles de Montesquieu (1689-1755). Auteur des Lettres persanes et de L’Esprit des lois , deux ouvrages fondamentaux pour le futur État de droit. Tout a commencé en mai 1729 au Horn Lodge à Westminster, en Angleterre. Ses livres, selon lui, étaient basés sur des principes maçonniques.

Benjamin Franklin (1706-1790). Inventeur du paratonnerre, promoteur de l’indépendance des Etats-Unis, rédacteur de la Constitution, ambassadeur en France… Un homme aux multiples facettes. Initié à l’âge de 24 ans, il fut un franc-maçon très actif tout au long du XVIIIe siècle.

Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832). Un des grands intellectuels de l’histoire. Romancier, poète, dramaturge, homme politique, scientifique… Il débute à la Loge Amalia des Trois Roses à Weimar en 1780.

Oscar Wilde (1854-1900). L’un des grands écrivains de langue anglaise de la fin du XIXe siècle. Il était une célébrité mondiale. Son incarcération pour homosexualité a été un scandale universel. Wilde a été initié à la loge de l’Université Apollo en 1875.

Winston Churchill (1874-1965). Le politicien le plus brillant du XXe siècle en Grande-Bretagne. Cela a commencé à Studholme Lodge en 1901. Le leadership de Churchill est particulièrement remarquable dans la direction d’un gouvernement d’unité contre le nazisme pendant la Seconde Guerre mondiale.

Et bien d’autres peuvent être cités : Harpo Marx (1888-1964), Joséphine Baker (1906-1975) ou encore Philippe d’Edimbourg (1921-2021), pour ne citer que des personnalités diverses, aux nationalités différentes et aux idéologies souvent contradictoires.

En tout cas, comme le rappelle Brunet, « la franc-maçonnerie est née avec l’illustration. Liberté, fraternité, égalité… Le sens que nous donnons aujourd’hui à nombre de ces mots vient de la franc-maçonnerie. Il serait difficile de comprendre le monde d’aujourd’hui sans les idéaux de liberté et de libre pensée intrinsèques à la franc-maçonnerie.

D’autres aspects qu’explore l’exposition ne sont pas moins importants : le poids des préjugés et la pertinence primordiale de la symbolique ont joué un rôle important dans l’évolution de l’Ordre.

La franc-maçonnerie ne serait pas comprise sans tous ceux qui l’ont persécutée à travers l’histoire. Cette persécution constante a signifié qu’à certains moments, l’institution devait être secrète, ainsi que discrète. Les maçons ont littéralement risqué leur vie.

La liberté de pensée et la liberté d’expression sont inhérentes à la franc-maçonnerie, et cela n’a pas plu aux pouvoirs. L’Église a été l’un des ennemis les plus puissants de la franc-maçonnerie, contrairement également au fait que le Grand Architecte de l’Univers maçonnique ne correspond pas exactement au Dieu chrétien.

Mais les francs-maçons ont également été accusés d’être des corporatistes, de profiter du pouvoir ou de l’exercer dans les coulisses – souvent en conjonction avec le judaïsme – d’hommes – essentiellement des hommes – qui veulent gouverner le monde.

Parfois, ces calomnies ont été particulièrement absurdes : pervers sexuels, cannibales, conspirateurs avec des extraterrestres… Tout a servi à inculper les francs-maçons.

Quant à la symbologie, débuter en franc-maçonnerie, c’est entrer dans un monde complexe de symboles et de rituels. Pour cette raison, ce n’est pas un chemin rapide : il faut passer des notes et, en fait, on n’arrive jamais au bout. Les trois premiers degrés sont déterminants : apprentis, compagnons et maîtres. Ensuite, selon le rituel, il y a plusieurs degrés qui montrent l’approfondissement de la réflexion et de la connaissance des symboles des francs-maçons. La plupart des rituels atteignent le 33e degré, un nombre qui à lui seul est également chargé de symbologie.

De nombreux objets et graphismes s’inspirent des traditions médiévales, mais ont été adaptés aux besoins des francs-maçons de réfléchir, de se connaître, de connaître le monde et de le partager avec leurs frères. La méditation et la discussion des symboles doivent amener le franc-maçon à se percevoir et à percevoir la réalité qui l’entoure d’une manière plus subtile et, en même temps, plus profonde.

Mais finalement, on peut dire que la franc-maçonnerie, malgré ses racines médiévales et sa symbologie archaïque, malgré les persécutions et les préjugés, est encore présente dans une grande partie de la Terre et fédère des hommes et des femmes de philosophies et de croyances souvent très disparates. Ce n’est pas un mérite mineur !

« Maçons ! » se veut une histoire respectueuse avec un regard actuel et ayant l’intérêt des citoyens. Il se visite jusqu’au 28 août.


A.S.: