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Discours d’Alain Michon, Grand Maître du Droit Humain

Le convent 2016 qui s’est déroulé du 26 au 28 août a vu l’élection d’un nouveau Grand Maître National à la tête de la Fédération française du DROIT HUMAIN : Alain Michon.

Alain Michon a été initié dans une loge grenobloise du DROIT HUMAIN en 1998. Il vient d’être réélu pour un second mandat de trois années au Conseil National de la Fédération française.

Dans son propos de clôture du Convent 2016, le nouveau Grand Maître National a tenu à situer sa réflexion dans le contexte actuel. Il a marqué sa grande préoccupation face aux risques de divisions inquiétantes  parcourant la société française. Il a insisté sur l’impérieuse nécessité de trouver des perspectives d’avenir partagées pour construire une humanité organisée en sociétés libres et fraternelles. A cette tâche les francs-maçons de la Fédération française du DROIT HUMAIN veulent apporter leur pierre.

Voici un extrait de son discours…

« Il faudra que nous soyons d’une grande vigilance car les temps qui viennent risquent de voir s’exprimer en toute impunité des messages de violences et de rejets. Autant de menaces contre la République fraternelle et unie que nous aimons. Des haines en miroir pourraient se nourrir l’une de l’autre et dessiner le pire cauchemar potentiel qui soit. Soyons donc très attentifs : des fissures, puis des failles pourraient s’ouvrir.

Soyons prêts à condamner le pire, à faire entendre la voix de paix et de partage à laquelle aspirent beaucoup plus de citoyens que nous ne l’imaginons. Il faudra trouver des mots qui rassemblent et qui ouvrent des perspectives raisonnées, et les faire entendre. Ne soyons pas les somnambules dont vient de parler récemment Edgar Morin.

Cette année la vie estivale fut brisée de morts, et beaucoup dans le monde se sont émus. Au bord de la Méditerranée, une nuit de 14 juillet, des vies, toutes sortes de vies, venant de partout pour une fête, ont été percutées, écrasées avec une sinistre et terrifiante application.

Puis il y eut Saint Etienne du Rouvray.

L’année nous est revenue en mémoire. En France mais aussi en Europe et dans le monde, des explosions, des massacres, des destructions d’humanité.

Et toujours les guerres.

Est-ce ainsi que des hommes et des femmes vivent, et meurent ?

Depuis un an, par milliers, des morts au fond de la Méditerranée, anonymes et sans autre tombe ou sépulture qu’une barcasse déglinguée. Un pays frontalier du nôtre a récemment fait remonter du fond de la mer environ 700 noyés – qui connaît le chiffre exact ? – d’une nuit d’avril 2015. Pour essayer de donner à ces corps, et grâce à des outils modernes, un nom, un pays de départ, un peu d’humanité. Retrouver une trace d’une histoire de vie, ne pas être juste un néant dans une statistique connue, mais ignorée. Ce projet magnifique est peut-être voué à l’échec, mais au moins existe-t-il. Ote-t-il pour autant l’effroi de leur mort ?

Est-ce ainsi que des hommes et des femmes vivent, et meurent ?

Où est leur renaissance dans l’oubli de la grande nuit ?

Le rêve et la volonté maçonniques de construire une humanité fraternelle sont intacts, bien sûr, ils ne sont pas diminués par ces horreurs, mais ils semblent se heurter au deuil, à la haine, à la perte, aux régressions en tous genres. L’idéal de la maçonnerie mixte du DROIT HUMAIN est-il audible ? Comment le faire entendre dans le brouhaha des prétendues informations dites en continu ?

Comment s’y prendre pour dire, affirmer, promouvoir l’idée que « l’Amour est plus fort que la mort » ? Il ne s’agit pas d’être faibles, naïfs ou lâches face aux franchisés de la terreur. Bien sûr que non. Il s’agit du fond des choses.

Le découragement alimente la mort. Pour demeurer fidèles il faut donc nous déprendre de la Mort qu’on pourrait croire plus forte que l’Amour.

Il faut trouver la force de réfléchir librement et au bon rythme au devenir du monde. Pour nous préparer à l’action. Car les francs-maçons du DROIT HUMAIN ne sont pas de purs contemplatifs. Des questions essentielles doivent s’activer ou se réactiver: Liberté – Egalité – Fraternité – Laïcité, liberté absolue de conscience, valeurs humanistes, universalité, République et République française, frontières, altérité, lutte contre le racisme et la xénophobie, droits des femmes…

Les francs-maçons du DROIT HUMAIN sont animés de la flamme de l’union, désireux de chercher, de faire du sens, et non d’user une langue de bois formelle. Leur rêve d’une humanité organisée en sociétés libres et fraternelles doit plus que jamais reprendre force et vigueur. Dans certains moments c’est justement là qu’il ne faut rien lâcher.

Nous ne devons pas davantage laisser sur le côté du chemin tout ce qui nous conduit à réfléchir à la société comme elle ne va pas, et aussi aux projets d’avenir mis en œuvre ici ou là.

Nous voyons bien que certains beaux mots filent à vau-l’eau, en d’étranges bouches parfois. Culture historique défaillante, logorrhée des éléments de langage usés jusqu’à la nausée, tics de com’. Il faudrait pouvoir « redonner un sens plus pur aux mots de la tribu » comme disait le poète, pensant « peuple » et non tribalisme bien sûr. Nous réapproprier la mesure des mots, mais aussi la mesure des réalités, des vrais enjeux, de la complexité des choses.

« Utopie » par exemple est piégé, certains l’associant à une inutile construction de l’imagination, voire à une coercition, à l’horreur de la pensée et du comportement uniques. L’écrivain italien Erri De Luca suggère que l’utopie soit au début des projets, non à leur fin… Cette idée n’est pas une pirouette de sophiste roublard.

Par ailleurs des alternatives qui prennent en compte l’humain  existent bien. Sachons voir des perspectives, c’est la meilleure réponse aux monstres qui rôdent en France et en Europe. Renouons avec l’appel à la culture ouverte, sur tous les plans, de la science à l’Art. Qui dit un mot sur ces sujets dans notre monde trop envahi par la précipitation ? Qui parle d’éducation ? Ce ne sont que des exemples.

Nous voulons, nous devons œuvrer pour la Beauté de la Fraternité. Et il faut user de tous nos outils.

Nous sommes reliés à cette idée du « Droit humain ». Ces deux termes contiennent, si on les développe et si on leur donne toute leur portée, un vrai projet d’avenir pour le progrès de l’Humanité.

A nous de les faire vivre aujourd’hui. »

A.S.:

View Comments (2)

  • Beau discours citoyen, idéaliste et politique. Quelle différence avec les logorrhées des politiciens ?
    C'est bien mais insuffisant pour un vrai souffle maçonnique. Dommage...