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Alchimie – Pour une autre conception du monde – Philippe Deschamps

Cet ouvrage vise en outre à réunir de manière explicite les éléments des deux aspects de l’alchimie : opératif et spirituel.

Alchimie – Pour une autre conception du monde de Philippe Deschamps

« Alchimie », voilà un terme qui sent bon le sel, le soufre et le mercure et dont la simple évocation transporte souvent le lecteur dans quelque sombre atelier dans lequel règne un feu d’enfer. Le secret inhérent à cette pratique la fit tomber dans l’oubli jusqu’au début du XXe siècle où Carl Gustav Jung vit dans ses symboles une description de l’évolution de la conscience humaine.

A ce jour, plusieurs milliers d’ouvrages ont présenté le thème sous des formes différentes. Alors pourquoi en écrire un de plus ? L’alchimie, souvent symbolisée par une femme à la robe couleur de ciel et couverte d’étoiles, malgré des traits toujours jeunes, vient des âges les plus anciens. Cette apparente contradiction révèle en fait son intemporalité et signifie que son langage mérite régulièrement une réactualisation. Son discours doit être rendu accessible au plus grand nombre sans tomber dans le piège d’une altération de ses symboles ; autrement dit sans réduire la portée de ce qu’elle montre sans jamais le dire. Cet ouvrage vise en outre à réunir de manière explicite les éléments des deux aspects de l’alchimie : opératif et spirituel.

Il présente donc dans un langage simple des notions sur l’alchimie, notamment dans ses aspects métaphysiques, ouvrant ainsi les portes sur la perception d’un univers vivant et intelligent. Quant à la dimension spirituelle de l’alchimie, elle est largement développée car c’est l’alchimie spirituelle qui permettra à l’homme de participer à l’évolution du monde dans lequel il doit s’intégrer harmonieusement.


Extrait du chapitre «Sept principes pour une échelle de Sages»Depuis un siècle, l’eau, la terre, le feu et l’air ne sont donc plus des «éléments». Il devient alors nécessaire d’envisager un nouveau terme pour désigner ces anciens composés traditionnels. Le travail se révèle d’autant plus facile qu’il ne s’agit pas vraiment d’éléments mais de principes, au sens latin de premiers, d’originels, recouvrant les différents aspects de la matière. Terre, air, eau et feu sont en effet des «principes» qui recouvrent les divers états de viscosité, de ténuité, voire de liberté de la matière. Cette nuance prend toute son importance si l’on veut comprendre les anciens ouvrages consacrés à la poursuite du grand oeuvre. «Prenez du mercure cru, faites-le cuire selon l’art, c’est-à-dire fixez ce qu’il y a de volatil, & volatilisez ce qu’il y a de fixe ; rendez liquide ce qui est sec, & sec ce qui est liquide ; alors vous aurez en votre pouvoir le vrai mercure philosophique», est-il écrit dans Le Grand OEuvre dévoilé de Coutan.

De la terre jusqu’au feu, nous avons affaire aux états solide, puis liquide, gazeux, enfin radiant de la matière, ou plutôt de la substance. Si l’on nous oppose que l’état radiant n’est déjà plus de la matière, alors il faudra préciser que ces principes n’ont pas non plus grand-chose à voir avec elle, puisque ce sont avant tout des idées. La terre recouvre l’idée de tout ce qui est dense, l’eau traduit ce qui coule ou la fluidité, l’air devient volatil, et le feu recoupe la notion d’énergie. Tout se complique d’ailleurs lorsqu’on constate, à la lecture des vieux manuscrits, que de grands hermétistes admettaient qu’un feu puisse être humide.

Nos «principes» possèdent par conséquent, et avant tout, une existence toute spirituelle, ce qui a fait écrire qu’ils n’existent à l’état pur que dans ce domaine particulier. Les éléments matériels procèdent des précédents et paraissent en général mélangés. Il peut y avoir du feu dans l’eau et de l’eau dans l’air – alors que chacun sait que l’eau se transforme en air par évaporation et l’air en eau par condensation -, bien évidemment selon le langage et la manière de voir de l’alchimiste. La façon dont l’opérateur observe et conçoit le monde se révèle en effet différente de celle du scientifique. Ce dernier découpe tellement la réalité qu’il ne perçoit plus certaines évidences encore accessibles à des esprits plus simples.
D’une certaine manière, sans amoindrir l’apport de la science moderne, les Anciens savaient que la terre pouvait, dans certaines conditions, assumer l’état de feu. Cela revient à évoquer le principe de conversion matière/énergie mis en équation beaucoup plus tard, en 1905, par Albert Einstein, sous la forme E = MC².


 

A.S.: