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L’AUTRE – PLANCHE MAÇONNIQUE

L’AUTRE

V\M\ et nous tous,  mes FF\ en nos défauts et qualités ! Puisque nous avons tous, bien sûr, de très grandes qualités, mais nous avons tous sûrement encore quelques défauts. C’est entre autre pour les corriger que nous sommes entrés en Franc-Maçonnerie et je nous propose ici une des notions à rectifier.

L’AUTRE  En latin, Alter Ego, autre moi. D’accord, mais quel autre ? On peut d’entrée en distinguer deux catégories, l’autre extérieur et l’autre intérieur. Toutefois, l’un et l’autre se rejoignent puisque l’autre n’est rien d’autre qu’un autre soi-même.

L’Autre extérieur : C’est ce différent qui n’est pas nous. Ce peut être le Frère d’à côté ou le voisin de palier, la personne que l’on croise dans la rue, l’étranger, le différent par la croyance, le genre, la couleur ou le comportement….. On peut étendre la notion à l’extrême avec le pêcheur Inuit aussi bien que l’aborigène australienne. Mais nous leur devons à tous le respect car, même s’ils sont tous l’Autre, ils sont nos semblables, nos frères et sœurs en humanité. Il faut donc tenter de comprendre leurs idées, leurs raisonnements, leurs différences, les admettre même et surtout s’ils diffèrent des nôtres, sans nécessairement les adopter. Peut-être les accepter ou les refuser si, après réflexion et analyse, ils peuvent modifier nos idées, nos jugements et peut-être nous enrichir, nous faire évoluer, rectifier nos défauts et élargir nos connaissances. Mais peut-être aussi tenter de modifier leur jugement s’il est négatif, limité ou excessif, et les amener à réfléchir, à évoluer, dans la mesure de nos moyens et toujours avec un esprit ouvert et tolérant si l’on découvre chez eux un aspect différent de La Vérité.

De tous temps et dans toutes les philosophies, croyances et religions, «Dieu» a dit aux hommes : «Aimez-vous les uns les autres.» Mais les hommes, quelques soient leurs convictions, semblent vouloir prouver le contraire, plus en imposant leurs vues par la violence que dans le respect de l’autre. Ma vérité est plus vraie que la tienne ! En Franc-Maçonnerie aussi nous en parlons beaucoup, mais agissons-nous toujours en fonction de la Loi d’Amour, car depuis quelques temps et de plus en plus, l’autre à tendance à disparaître de notre environnement et de nos préoccupations.

Le tout premier réflexe à avoir vis-à-vis de l’autre, ce serait d’abord de prendre conscience qu’il existe ! Qu’il y a un autre être vivant à côté de nous. Ce peut être aussi de simplement dire bonjour, merci ou s’il vous plait, ou d’échanger quelques mots pour lui signifier que l’on reconnait son altérité, que l’on tient compte de lui, que l’on accepte sa façon de nous voir.

Mais qui sommes-nous pour l’autre ? Il nous voit au travers de ses idées, ses jugements, son caractère et sa forme de pensée, puisque ses bases sont forcément différentes, puisqu’il est autre ! Et les mots qui ne sont que des symboles, sont toujours prononcés en fonction d’une forme de pensée propre à chaque individu.

Constatation : il ne nous voit pas comme on voudrait qu’il nous voit, et le grand problème qui est souvent le nôtre, c’est qu’il n’est pas comme l’on voudrait qu’il soit ! Peut-être faudrait-il alors nous mettre à sa place, le comprendre et tenter d’adopter sa vision en faisant abstraction de la nôtre, essayer de nous voir à travers lui, et peut-être alors de modifier nos apriori le concernant. Pour pouvoir dialoguer avec « l’autre », il ne faut donc pas écouter ce qu’il dit, mais comprendre ce qu’il veut dire.

Mais ensuite, qui est l’autre en nous ?

L’Autre intérieur : Il nous concerne peut-être un petit peu plus en tant que Franc-Maçon. ²Alter ego ». Petit ego joli, dis-moi qui est le plus beau, le meilleur ! Méfions-nous, mes Frères, la tête ça enfle aussi quelquefois de l’intérieur, c’est pour ça que ça ne se voit pas ! Ma Loge-Mère s’appelle «Tolérance et Liberté». J’y ai rencontré des Frères vrais et sincères dans leur recherche de Fraternité et d’Amour, mais aussi d’autres, autocentrés, impatients du grade supérieur, qui pensaient surtout d’abord à eux et de temps en temps aux autres quand ceux-ci pouvaient leur être utiles. «Nous ne sommes que des hommes et nous sommes là pour nous améliorer», m’a-t-on répondu. Nous sommes tous à la recherche de la reconnaissance de notre individualité, de notre liberté, mais aussi quelquefois d’abord celle de la satisfaction de nos ambitions. De grandes paroles mais peu d’actes ! Des Tabliers qui rayent le parquet !

Vous avez sûrement remarqué, autant à la télévision, la radio, que dans la majorité des conférences, débats et même quelquefois dans nos Loges, la facilité avec laquelle les intervenants commencent leurs première phrase par la sacro-sainte formule : MOI JE….

Dans ma jeunesse, au lycée, je l’employais assez souvent dans mes dissertations. Au point qu’un jour, le professeur m’a repris en me conseillant de l’éviter, en la remplaçant par une autre formule, ou alors en plaçant le « je » plus loin dans la phrase. En bon élève, je m’y efforçais donc au point que cela devienne quasi systématique. Ce n’est que plus tard que j’ai compris le but de ce professeur. Il souhaitait simplement que j’évite de m’auto centrer, de me refermer sur moi-même, sur mon égo, au lieu de m’ouvrir. Quel rapport avec la Maçonnerie, à part l’allusion à nos Loges, et notre présence ici ce soir ?        Réponse, Le Miroir !!

Regardons-nous de l’extérieur, comme si nous étions l’autre. Nous avons tous prêté serment de nous rectifier, alors rappelons-nous le miroir de notre initiation, où nous n’avons souvent vu alors que notre pâle reflet habituel. Désormais, devant n’importe quel miroir, ne remettons pas une cravate ou une mèche en place, mais acceptons-nous et regardons-nous en face, dans les yeux, sans tricher, pour y percevoir le fond de nous-mêmes. Regardons-nous derrière le miroir !

Un Passé Maître avait conseillé à un jeune Apprenti de se rapprocher du Frère avec lequel il semblait avoir le moins d’affinité, sage conseil puisqu’on ne s’enrichit que de la différence de l’autre. La pensée de l’autre est un miroir qui nous permet de réfléchir.

Nous serons donc toujours l’autre d’un autre ! Mais Intérieur ou extérieur, l’Autre demande un engagement, un effort constant. Ils nécessitent tous deux un combat, une persévérance dans l’effort et la compréhension. Soit envers mon semblable pour comprendre sa différence, la respecter et l’accompagner dans la mesure de mes moyens. Soit pour modifier mon ego, m’analyser, comprendre mes défauts, mes manques, mes possibilités ou même mes qualités, et essayer de tout faire pour les rectifier, parce que j’ai prêté serment, devant mes Frères mais surtout vis-à-vis de moi-même.

Il faut réapprendre le «vivre ensemble» ! Peut-être repenser les systèmes éducatifs, réapprendre aux enfants et aux politiciens les valeurs morales, civiques et éthiques. Liberté Égalité Fraternité. La devise républicaine n’a d’abord été formée en 1789 que des deux premiers mots, ce n’est que plus tard, 1790, que la Fraternité fut ajoutée, et que de travail reste encore à faire !

Aussi je pense que c’est en refusant d’exclure et en tentant à chaque instant de voir ce qui relie les choses et les êtres qui nous semblent opposés, que nous parvenons à voyager, à accéder au centre de nous-même.

Il suffit de contempler un simple lever de soleil ou une nuit étoilée pour prendre conscience de notre infinie petitesse par rapport à l’immensité du cosmos. Même si l’homme cherche toujours à être calife à la place du calife, nous devons réfléchir à notre vanité, notre prétention, et faire œuvre de la plus humble humilité. Hubert Reeves nous appelle «poussière d’étoile», physiquement nés de la poussière, nous y retournerons et lorsque l’Âme, la Vie, semblera éteinte, seul l’Esprit restera pour revivre sous une apparence différente pour poursuivre le travail.

Désormais posons-nous continuellement la question : comment vivons-nous la Fraternité au quotidien, à l’extérieur comme à l’intérieur, puisque l’une ne dépend que de l’autre.

On pourrait alors conclure en disant que c’est par l’acceptation de soi et par l’Amour de l’autre que nous nous construisons.

Vénérable Maître et nous tous mes Frères, j’ai dit.

Pascal A. Janvier 2017

A.S.: