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Francs-maçons et protestants

La Une de l’hébdomadaire protestant et réformateur « Réforme » est consacrée à la franc-maçonnerie et plus précisemment sur le thème « francs-maçons et protestant.

Historique de cette « relation » et interview de Pierre Lambicchi, Grand Maître du Grand Orient de France.

Enquête. Après avoir contribué, ensemble, à l’émergence d’une République laïque, les protestants et les francs-maçons suivent des chemins différents. Par-delà les malentendus, les liens fraternels demeurent.

Protestantisme et franc-maçonnerie ont longtemps fait bon ménage. La chose est bien connue : l’un des textes fondateurs de la franc-maçonnerie fut rédigé en 1723 par deux pasteurs britanniques, James Anderson et Jean-Théophile Désaguliers, lequel faisait partie du Refuge huguenot. Certes, lorsqu’elle s’est étendue à la France, la maçonnerie n’était pas du tout liée au protestantisme, puisqu’elle séduisait d’abord les princes de l’Église catholique et les aristocrates qui, par une sorte de snobisme, jouaient à croire, au sein des loges, que l’on pouvait abolir les inégalités de la naissance. Mais deux événements ont créé les conditions d’un rapprochement décisif : d’une part la papauté a condamné en 1738 un mouvement qu’elle considérait comme sacrilège, d’autre part nombre de pasteurs revenant en France à partir de 1760 étaient francs-maçons. « Formés à Lausanne par le fils d’Antoine Court, initiés en maçonnerie en Suisse, ils ont contribué à l’implantation de la franc-maçonnerie languedocienne, rappelle l’historien Patrick Cabanel. Par la suite, au XIXe siècle, les protestants français, comme les juifs, ont beaucoup fréquenté les loges parce qu’elles constituaient l’un des rares réseaux de sociabilité ou de notabilité qui n’étaient pas dirigés par des catholiques. » En retour, les catholiques ont réuni dans une même détestation les protestants, les juifs et les francs-maçons.

Une maçonnerie laïque
C’est dans ce contexte que Frédéric Desmons entre en scène. Alors que les protestants français se divisent entre orthodoxes et libéraux, ce pasteur réformé du Gard dénonce, en 1877, la contradiction fondamentale que contient la constitution du Grand Orient de France, la plus importante obédience du pays. D’un côté, elle affirme l’obligation de croire au Grand Architecte de l’Univers (que les maçons appellent familièrement le GADLU), auquel il était impensable, au début du XVIIIe siècle, de ne pas se référer. De l’autre, elle reconnaît la liberté de conscience comme une valeur essentielle. « En faisant supprimer la soumission au GADLU, Frédéric Desmons a séparé l’ordre religieux et l’ordre maçonnique », explique Michel Miaille, professeur honoraire à la faculté de droit et Grand Maître d’une petite obédience maçonnique. C’est ainsi qu’est née la franc-maçonnerie libérale, indépendante de l’organisation officielle, la Grande Loge Unie d’Angleterre.

A.S.: