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LES SERMENTS DES MAÇONS – CHRONIQUE DE PATRICK CARRE

Patrick Carré poète, philosophe, et Franc-Maçon viendra sur GADLU.INFO nous offrir une chronique pour nous parler et donner du « sens », pour recentrer la réflexion sur les Maçons eux-mêmes. Sa signature est « Etre bien en soi-même, sans se déconnecter du chaos ambiant« .

Aujourd’hui une chronique qui, tout en « rafraîchissant » la mémoire, devrait « réchauffer » les esprits des Maçons  : Les serments des Maçons : vertus et perspectives

 

Les serments des Maçons : vertus et perspectives

Les serments des Maçons sont fondateurs car ils prennent en défaut ceux qui les prêtent dès leur premier écart, signe d’une première prise de conscience et d’un retour nécessaire à la parole donnée, symbole prometteur d’une « parole perdue » et « retrouvée » … Ils révèlent en force à l’initié(e) par des éclairs de lucidité la place centrale de son être moral et des structures mentales qui lui correspondent et lui confèrent sa « tenue ». Il (Elle) se « rectifie » et par le fait ouvre à sa « rectitude » une perspective à plusieurs « niveaux » de plus en plus subtils sur l’axe central de sa « perpendiculaire » et de son « unité » : la droiture, la justice, l’équité. Les mots prononcés dans les serments sont lourds de sens et redorent le « blason » des symboles et du « symbolisme » en général, véritable discipline de l’esprit.

C’est ici que l’initiation traditionnelle renouvelle les modes de pensée, et se dé-marque des modèles où l’unité se dilue dans un tout indéterminé d’idées et de « vœux pieux » « à volonté », et se perd dans des « tout » à géométries variables où la règle de l’un, de l’humble, le plus petit de tous, se soumet à la loi du plus fort de tous. L’« éternel retour » à la parole donnée s’effectue devant l’autel des serments, où se croisent et s’entremêlent l’équerre, le compas et le Livre de la Loi sacrée, ternaire ramenant à l’unité les discours « rectifiés » et les idées mesurées conformes à la règle de leur auteur et à celle de la Loge. Dans une Loge au travail, toute règle imposée au discours et librement acceptée se transforme en limite inspirante pour l’orateur, comme en poésie les règles d’écriture démultiplient les leviers d’inspiration de l’imaginaire, où tout devient symbole inspirant.

Issu du grec ancien « sumbolon, σύμβολον », le mot « symbole » dérive du verbe « sumbalein », de « syn-, avec », et « -ballein, jeter, mettre ensemble, joindre, comparer, échanger, se rencontrer, expliquer ». En Grèce, un « sumbolon » était au sens propre et originel un tesson de poterie cassé en deux morceaux et partagé entre deux contractants, de sorte que la réunion de ces morceaux, par un assemblage parfait, constituait une preuve de leur origine commune et un signe très fort de reconnaissance. Le symbole résulte du mouvement de ses deux parties l’une vers l’autre, afin de reconstituer un « tout » unique et parfait, leur « symbolique » s’attachant aux mouvements des parties et aux forces qui les séparent et les réunifient, jusqu’à se heurter comme deux morceaux de silex et déclencher de réelles étincelles de prises de conscience. Ces « saisies » en conscience de liens subtils témoignent de l’esprit « éveillé » de leurs auteurs, transformant les spectateurs et témoins passifs de leur vie en acteurs et en éveilleurs.

Car l’état d’éveil transforme l’éveillé en porteur et protecteur de sa lumière, en « passeur » et « gardien » d’un état de conscience subtil et précieux qui le conduit à croiser « régulièrement » le chemin de ses semblables « éclairés », d’une part en fraternité dans des Loges initiatiques au travail perpétuant les conditions rituelles d’allumages de ces flambeaux intérieurs, d’autre part en humanité pour retendre et réchauffer en chacun le fil ténu de la vie. Les belles rencontres de cette vie semblent alors se produire sous les auspices d’un Grand Architecte enflammant « régulièrement » ceux qui se rencontrent pour travailler à sa gloire, à charge pour eux de nourrir et d’entretenir leur propre feu. Mais ses flammes éclairent tout jusqu’à révéler en détails ses parties, et « le diable est dans les détails » ! Le « diabolique » (du grec « diaballein », de « dia- à travers », et « -ballein, jeter », c’est-à-dire diviser, disperser, par extension rendre confus) est l’antonyme littéral du « symbolique », ce qui relie.

Les planches symboliques qui s’attachent dans les moindres détails à tous les symboles de la Loge ne pactisent pas avec le Diable, mais contribuent à l’apprentissage d’un langage symbolique maçonnique commun, tout en remettant « régulièrement » « les points sur les i » des mots des rituels pour souligner leur raison d’être. Et ce passage par les racines des mots « enracine » en retour les Maçons responsables d’eux-mêmes et de leur parole en les éclairant sur la raison de leur choix ou de la mise à l’écart d’un mot ou d’une idée. Le langage des hommes responsables qui se détourne des discours généralistes se perfectionne ainsi en substituant à des mots imprécis des mots justes, revivifiant l’esprit qui les anime et recentrant les Maçons sur l’axe vertical de leur dimension spirituelle.

L’étude des symboles du Temple et leur visualisation par des tracés géométriques conduit pareillement les Maçons à restructurer leur propre espace intérieur en faisant coexister plusieurs « niveaux » de construction s’affranchissant les uns des autres, symbolisés par les trois ordres d’architecture « dorique », « ionique », « corinthien » des trois « piliers » des Loges symboliques au travail, figurés de bas en haut sur la façade de l’église Saint-Gervais à Paris. Les Maçons apprennent pareillement à faire coexister en eux-mêmes ces trois ordres d’architecture en tant qu’hommes libres et de bonnes mœurs. Il sont libres car ils savent s’affranchir de modes de pensées dépassées par des connaissances renouvelées, transformant par là même leurs niveaux de conscience, et de bonnes mœurs car ils savent faire coexister harmonieusement ces niveaux de connaissance et de conscience, comme se côtoient en Loge des hommes et/ou des femmes de tous niveaux, conditions, races et religions.

L’esprit qui les anime n’est pas « sage » et apprend à s’écarter « régulièrement » des voies tracées par l’ordre établi, mais revivifie ceux qui se renouvellent en empruntant des voies substituées, substituant à la fuite en avant des esprits sans repères dévorés par leurs passions désordonnées, des re-connaissances de points de fuite en rapports de proportion les uns avec les autres et structurant des espaces et des temps de vie communs librement choisis et acceptés. Autant de tracés intérieurs et de « traits d’esprit » donnant une identité à chacun(e), une signature condensant ses traits « marquants ». Les Maçons spéculatifs ont substitué à ces tracés d’anciennes « marques » de Maçons opératifs deux mots les reliant intimement à leur parole, comme ils relient l’homme au souffle qui l’anime : « J » « ai dit » !

Patrick Carré


 

Patrick Carré, né le 14 janvier 1953, est poète, philosophe, et Franc-Maçon français. Son œuvre littéraire et artistique comprend un nombre considérable de poèmes et de textes philosophiques principalement sur l’Initiation Traditionnelle à la vie spirituelle.

Initié à 23 ans à la Grande Loge de France, il est membre de la Juridiction du Suprême Conseil de France, de Rite Ecossais Ancien et Accepté.

Diplômé de Philosophie (Faculté de Rennes), de Gestion (IGR et Enass), d’Arts Plastiques (Institut Van der Kelen-Logelain à Bruxelles et CAP de potier tourneur).

Son site internet « Patrick Carré Poésie » http://www.patrick-carre-poesie.net/  de 1000 pages, premier site de langue française d’études et de poèmes d’un Franc-Maçon avec plus de 800.000 visiteurs, concentre ses travaux et recherches sur l’Initiation Maçonnique, en particulier tous les degrés du Rite Ecossais Ancien et Accepté (REAA), symbolisant l’Œuvre alchimique de perfectionnement et de transformation intérieure des Maçons.

Livres et disque

  • Livre « Francs-Maçons Alchimistes » (2015) (Editeur LiberFaber http://liberfaber.com/fr/accueil.html )
  • CD « Le Flambeau » (incluant le recueil des 12 poèmes) (2013)
  • Livre « Cathédrales » (2006)
  • Livre « La Femme Chair, Cœur, Esprit » (2006)

Conférences

  • Pensée symbolique et pensée sensible, illustrées par Dürer
  • La pensée symbolique
  • La Femme et la mixité en Franc-Maçonnerie
  • La poésie en Franc-Maçonnerie
  • L’univers du potier tourneur
  • Le vitrail alchimique de la Cathédrale d’Orléans

Membre aux USA de la Masonry Poetry Society ( http://www.mpoets.org/ProceedingsNo7.htm )

Lauréat France Musique Contes du jour et de la nuit (émission du 12/06/2014) ( http://www.francemusique.fr/emission/contes-du-jour-et-de-la-nuit/2013-2014/selection-france-2-du-4e-appel-ecriture-patrick-carre-5-5-06-12-2014-00-00 )


 

A.S.: